Cadix

Rédigé le 18/12/2023
Frederic André

Erytheia, Gadès, Gadir, Didýme, Cadix, tant de noms et tant d’héritages… La plus ancienne cité d’Occident a derrière elle de nombreux mythes et de multiples légendes se mêlant à son histoire passionnante. Sa longue épopée trimillénaire est portée avant tout par sa situation géographique unique, hésitant entre l’Europe et l’Afrique, entre la mer Méditerranée et l’océan Atlantique. La cité s’est dédiée corps et âme à la mer dès la pose de ses premières pierres. Les voies commerciales initiées à l’époque phénicienne sont multiples et se consolideront sous l’empire romain. De nombreuses pages de l’ère coloniale ont été écrites à Cadix par les plus grands navigateurs. La splendide ville est propice à des découvertes magiques. C’est l’une des contrées les plus belles et les plus fascinantes. Elle propose de multiples promenades où l’on se perd dans ses jolies ruelles et où l’on se trouve face à de multiples merveilles, témoins d’un riche passé. Programmer un séjour à Cadix, c’est aussi s’offrir une escapade envoûtante où se mêlent histoire, plages, traditions et charme andalou. Une fois les marais salins franchis, on atteint cette vieille ville installée sur un impressionnant promontoire sur l’Atlantique. Elle ramène ceux qui veulent la découvrir vers l’âge d’or espagnol et crée une ambiance unique où luminosité, singularité et joie de vivre vous attrapent complètement. Magique Cadix est aujourd’hui tournée vers l’avenir et son histoire, c’est au présent qu’elle la conjugue. Cadiz peut paraître poussiéreuse voire décatie avec ses façades usées aux couleurs un peu passées. Mais on ne peut nier son charme certain et l’ambiance qui y règne. Très différente de ses voisines andalouses, la cité est l’une des plus belles villes d'Occident, alors prenez le temps de vous imprégner de sa superbe et embarquez avec votre guide Esprit Sud Magazine pour un voyage inoubliable!



Il était une fois la plus ancienne cité de l’Occident…

C’est entre mer et océan que s’est écrit l’histoire de Cadix. De multiples conquêtes et civilisations ont marqué la ville, forte de ses positions stratégiques tant militaires que commerciales et véritable carrefour des peuples. Initialement, ce sont les Tyriens, issus d’une colonie phénicienne et plus ancienne civilisation du monde occidental, qui s’y sont installés. Même si ses origines remontent aux années 3500 avant J-C (à la fin du Néolithique, début de la période du bronze), le peuple phénicien originaire de ce qui correspond de nos jours au territoire du Liban, forge les premières lettres de noblesse à la cité de lumière et se dévoue à la mer et au commerce. Ils appellent la ville Gadir qui pourrait avoir pour signification « fortification » ou « château fortifié ». Plus tard, Cadix prend le nom de Gadès et devient une ville de grande importance dans l’Empire romain. Un théâtre romain de 120 mètres de diamètre est érigé au premier siècle avant J-C et devient le deuxième plus ancien amphithéâtre découvert à ce jour après celui de Pompéi. 10.000 spectateurs pouvaient assister aux multiples spectacles qui s’y déroulaient. Autres traces de cette glorieuse époque romaine, on y retrouve aussi les vestiges d’une fabrique de salaison et un columbarium (tombes, fours de crémation, …). La ville connaît un lent déclin lors de la chute de l’Empire au IIIème siècle après J-C et voit ensuite les peuples wisigothes, byzantins et musulmans se succéder.

Cadix tombe dans les mains des catholiques en 1264 lors du programme de la reconquête du Guadalquivir. Annexée au Royaume de Castille, elle retrouve son souffle et renaît peu à peu de ses cendres. Les siècles d’or de l’ère coloniale verront les navigateurs Christophe Colomb, Álvar Núñez Cabeza de Vaca et autres conquistadors quitter le port ou y revenir. Sa splendeur économique atteindra son apogée au XVIIIème siècle et ce à travers le commerce. Cadix accueille la « Casa de Contratación » (Ministère des Finances des Explorations Maritimes) et le Consulat des Indes qui étaient installés auparavant à Séville. Devenue le centre du commerce outre-mer, un véritable lieu d’échange où transitent toutes les marchandises et tous les trésors, la ville de Cadix voit la bourgeoisie s’y installer.

Les richesses légendaires de Cadix lui forgent une réputation telle que sa baie devient le théâtre d’innombrables batailles navales. Napoléon tente vainement de s’emparer de la cité qui devient aussi le berceau de la première Constitution espagnole. Guerre d'indépendance et effondrement de toute une économie avec la perte de Cuba, Cadix tente difficilement de résister mais perd son importance au niveau national. Le XXème siècle est une période de lent déclin mais c’est une ville renaissante trouvant un souffle nouveau dans les échanges avec le continent en face, les bateaux de croisière et l’activité de son chantier naval (dans la zone du Trocadéro), véritable poumon économique, que l'on découvre aujourd'hui.



Tasse d’argent ou petite Havane ?

La belle cité de lumière arbore fièrement plusieurs surnoms. Tout d’abord, citons « la tacita de plata », soit la petite tasse d’argent car selon certaines légendes urbaines, les habitants, autrefois, sortaient dans la rue pour prendre le café avec leurs plus jolies tasses qui scintillaient sous le généreux soleil. D’autres avancent la piste que la baie aurait la forme, vue du ciel, d’une petite tasse. « La pequeña Habana » (ou Habanita) est son second sobriquet car elle lui ressemble tant. La jolie ville nous rappelle ces cités coloniales avec leurs étroites et longues ruelles, leurs rues fatiguées et usées par le sel et le vent, leurs jolies places où trônent des kiosques au charme désuet et où des jardins magiques peuplés d’arbres et de plantes exotiques invitent au dépaysement. « Ville de lumière » comme le chantait le groupe Gold, lui correspond aussi parfaitement. La lumière y est omniprésente près de 340 jours par an. Au gré des saisons, Cadix offre une palette de couleurs magnifiques. Il y règne une véritable douceur de vivre…



C’est un réel enchantement de parcourir le « Barrio del Populo », le cœur névralgique de la vieille ville de Cadix. Véritable dédale de ruelles et de rues, on y croise artistes et artisans. Nous longeons les ruines d’édifices millénaires dans un quartier limité par un océan immense. Émerveillés, nous croisons d’anciennes portes d’entrée, des arches ayant résisté aux différents assauts du passé et des édifices dont les portails fascinent par tant de beauté. Le quartier bouillonnant prend un autre visage dès que le jour fait place à l’obscurité. A la nuit tombée, « El populo » dévoile alors tous ses charmes avec ses nombreux cafés, ses animations et les concerts et spectacles qui s’y déroulent. Le « cœur » de la ville bat la chamade. 

Débutons notre découverte de ce quartier en arpentant la très belle Plaza de San Juan de Dios, tournée vers le port et les deux colonnes d’Hercule, les Gaditans tiennent à perpétrer les légendes. Une jolie fontaine nous mène à la Mairie qui occupe le même bâtiment depuis le XVIème siècle même s’il fut entièrement reconstruit milieu du XIXème siècle. Sur la place, on tombe immédiatement sous le charme des façades baroques aux balcons croquignolets. Les bâtisses sont fleuries et offrent souvent de jolis patios décorés. La Calle Plocia, située derrière le Palais des Congrès, propose une multitude de délicieux restaurants à la cuisine riche et savoureuse. Nous avons testé l’établissement, El Aljibe (au numéro 25) et nous n’avons pas été déçus. Le chef propose un riz de la mer fabuleux et une tarte au chocolat renversante.  

Derrière l’Hôtel de Ville, on découvre un lieu mythique évoqué dans les œuvres de Cicéron. Récemment découvert à l’occasion de fouilles censées localiser le Château de la Villa (en 1980), les ruines du Théâtre Romain de Gadès semblent observer paisiblement l’océan Atlantique tourmenté. D’une capacité de 20.000 spectateurs et d’un diamètre de 120 mètres, le « Theatrum Balbi » est le plus ancien et le deuxième plus grand théâtre d’Hispanie. Il aurait été construit au premier siècle avant J-C, sous le Gouverneur Lucius Cornelius Balbus, ami et conseillé de Jules César. L’édifice aux gradins échelonnés (en excellent état de conservation), est abandonné à la fin du IIIème siècle et nombreuses de ses pierres furent pillées ou utilisées à des fins d’autres constructions. Il a la particularité d’être édifié en épousant parfaitement une falaise naturelle, ce qui le dissimule et le rend pratiquement invisible lorsque l’on se balade dans le quartier. La visite est gratuite et permet aussi de découvrir une galerie annulaire qui s’étire sous les gradins.



Situé à proximité du théâtre, le site archéologique de Gadir est une autre belle étape dans notre voyage dans le temps. Témoignant de la vie des Phéniciens, il nous plonge plus de 3000 ans en arrière. A travers un sol transparent, on découvre les ruines d’un ancien quartier et surtout l’ingéniosité de nos ancêtres (le « Yacimiento Arqueológico Gadir » est situé au 15 de la Calle San Miguel). À la sortie du site, nous nous trouvons face aux deux gardiennes de la ville, elles ont une longue histoire à nous conter…



Cadix est le refuge espéré du marin, un synonyme de bonheur mais aussi de tristesse. C’est un havre de paix où l’on éprouve une intense joie de retrouver la terre ferme après de longues périodes en mer mais aussi un véritable enfer que le navigateur quitte, l’estomac noué et l’âme en peine, lorsqu’il prend le large et vogue au gré du vent vers l’inconnue.

Des légendes comme s’il en pleuvait

On dit de Cadix qu’elle a vu Hercule vaincre Gerion, géant à trois bustes, succombant d’une flèche plantée dans la partie unissant les trois corps. Le héros mythologique y aurait également séparé les deux continents. En 2022, une équipe espagnole d'archéologues a également localisé une zone d'importants vestiges sous-marins en plein cœur de la baie de Cadix. Les chercheurs semblent convaincus qu’il s’agit des restes du sanctuaire d’Hercule Gaditanus, l’un des plus recherchés. Ce temple, véritable porte d’entrée du port de Gadès, a été édifié entre les IXème et XIIème siècles et y renfermerait les cendres d’Hercule. Dédié au Dieu Melqart (ou Melkart), il est transformé par les Romains en lieu de culte consacré à Hercule. Les murs de ce temple auraient vu passer le grand Hannibal (qui quitte la cité pour partir à la conquête de l’Italie) ou encore Jules César (la ville n’a de rivale à l’époque que la grande Rome et il y séjourne huit années). Une équipe dirigée par des archéologues de l’Université de Séville a localisé entre les lieux-dits « Camposoto » et « Sancti Petri » les vestiges d’une structure monumentale qui pourrait s’apparenter au fameux sanctuaire. Les recherches en cours, pourraient mener à la découverte d’un lieu légendaire… Rappelons enfin que les Gaditans considèrent le personnage mythologique d’Hercule comme le fondateur de la ville. Son image figure sur le blason de la ville, placé entre les célèbres colonnes qui représentent la fin du monde.



Ancienne et nouvelle cathédrales, deux gardiennes pour la ville lumière

A l’instar de Salamanca, Cadix fait partie des rares villes espagnoles qui disposent de deux cathédrales. Nichées toutes les deux dans le Barrio del Pópulo, elles sont les témoins de deux époques bien différentes. Temple le plus chargé d’histoire dans la ville, la cathédrale primitive, rebaptisée Église de Santa Cruz, a été fondée dès la reconquête par le Roi catholique Alphonse X, dit Le Sage, au XIIIème siècle (il avait fait le vœu d’y être enterré mais sa volonté ne fut pas respectée). En 1262, Cadix, incorporée à la Couronne de Castille, voit cette ancienne mosquée obtenir le rang prestigieux de cathédrale. Plus tard, un grave incendie la détruit en 1596 lors de l’assaut des troupes anglo-hollandaises et elle fera l’objet d’une reconstruction les années qui suivent, cette fois, dans un style d’inspiration gothique-mudéjar. Son joli clocher carré est coiffé d’une coupole colorée et son intérieur très sobre avec de jolies colonnes toscanes soutenant des arcs en plein cintre ne manquent pas de charme. «La Vieille Cathédrale» laisse donc son titre à sa jeune sœur en 1838 et, avec ce « passage de pouvoir », elle se voit aussi dépouillée de nombreux ornements et objets religieux. Il faut dire qu’elle avait de plus en plus mauvaise mine avec un état plus que dégradé et le désir était pressant d'avoir à Cadix un monument religieux en adéquation avec l’importance de la ville à l’époque (rappelons que Cadix accueillait la Chambre de Commerce depuis 1717, transféré de Séville). 



A quelques enjambées, on découvre la cathédrale "éternelle", oeuvre baroque portée dans le coeur de tous les Gaditans. Impressionnante dans sa robe blanche et couleur sable, la grande dame voit sa construction débuter en 1722 sur base des plans ambitieux de l’architecte Vincente Acero. Elle est achevée plus d’un siècle plus tard en favorisant une approche architecturale plus néoclassique. Même si les dimensions de ses tours (la façade ouest est inspirée de la Cathédrale de la Havane à Cuba) ou de son dôme doré sont revus à la baisse, elle en impose et domine les bâtiments aux façades bigarrées du front de mer. C’est en effet à l’époque de la glorieuse Espagne, reine des conquêtes de par le monde, que fut décidée sa construction. Visiter l’intérieur de la Cathédrale «Nueva» (Nouvelle Cathédrale), c’est aussi constater sa démesure, renforcée par le côté dépouillé de la pierre. On tombe aussi sous le charme des stalles du choeur, une splendeur réalisée en acajou et ciselée avec finesse. Les mélomanes apprécieront aussi la salle funéraire où repose le grand compositeur Manuel de Falla, enfant de la ville. Le Musée de la Cathédrale (el Museo Catedralicio) vaut également le détour avec sa riche collection. Il est situé à la sortie de la grande dame dans les très beaux édifices, la Casa de la Contaduria et la Casa Termineli, datant toutes les deux du XVIème siècle. Depuis 2003, la Tour de Poniente dressée sur le côté droit de la Cathédrale, domine la ville de ses 74 mètres. Sa rampe permet d’accéder au clocher offrant un magnifique panorama sur la ville qui s’étend à ses pieds. La Cathédrale Santa Cruz sobre el Mar est donc un véritable joyau niché au cœur de la vieille ville, toujours en phase de restauration. Chaque jour, elle est un peu plus rongée par l’humidité, le sel et le temps qui passe. Le calme que l’on retrouve dans cet édifice contraste avec vie et effervescence qui règnent en maître sur la place de la cathédrale. Artistes de rue, créateurs de bulles géantes de savon, magiciens, musiciens, on ne s'ennuie jamais face à la « Grande Dame ».


En empruntant la Calle Compañía, dirigeons-nous maintenant vers la pittoresque Plaza Topete que les Gaditans appellent souvent la Plaza Flores car elle accueille un joli marché aux fleurs. Cette place de forme triangulaire est aussi bordée d’établissements proposant de délicieux churros. Mis en appétit par cette pause sucrée, nous rejoignons le Mercado Central de Abastos, situé sur la Plaza Libertad, l’un des plus vieux marchés couverts d’Espagne. Depuis 1838, il accueille un véritable espace gastronomique. Il est devenu un passage obligatoire pour les fins gourmets. Restauré récemment, le marché a retrouvé toute sa splendeur. Son architecture néoclassique recrée une agora de l’Antiquité et est devenue l’écrin parfait pour les étals de Luisa ou de Manolito qui proposent une multitude de produits parmi lesquels dominent bien évidemment fruits de mer et poissons. Ce marché coloré aux mille parfums est une immersion dans la vie des Gaditans. Les 147 stands rassemblent tous les produits andalous dans un seul lieu et proposent aussi des tapas à déguster immédiatement, pour ne rien perdre de cette convivialité qui règne dans ce lieu magique. Attention, le lundi est le jour de repos des poissonniers ! 



Alors que nous nous apprêtons à quitter ce quartier populaire, nous sommes intrigués par une tour qui semble dominer les toits de la ville. La Tour Tavira, deuxième point culminant de Cadix après la Tour de Poniente, culmine à 45 mètres au-dessus du niveau de la mer. Construite au XVIIIème siècle (époque de la grande prospérité maritime), comme de nombreuses autres dont la mission était de prévenir de l’arrivée de navires, cette tour de vigie est devenue l’une des attractions touristiques de la ville. Un dispositif optique y a été installé, composé d’une chambre noire avec périscope, miroir et lentilles grossissantes, le tout permettant d’observer la ville dans ses moindres détails, à 360 degrés et en temps réel. Ce système ingénieux est tout simplement fascinant ! La Torre Tavira vous attend au 10 de la Calle Marques del Real Tesoro. Retrouvez tous les détails sur cette incroyable visite sur le site suivant www.torretavira.com. Grâce à ce dispositif bluffant, nous apercevons une jolie plage de sable fin, protégée en ses deux extrémités par deux fortifications et dominée par un élégant bâtiment blanc. C’est notre prochaine destination ! 



Autre quartier, autre ambiance …

L’ancien quartier des pêcheurs gaditanos porte le nom de « Barrio de la Viña ». Les petites rues pittoresques sont le théâtre de tout un patrimoine lié à l’art de la pêche, aux festivités de la Semaine Sainte, à la passion du flamenco mais aussi au folklore du carnaval. La Calle Virgen de la Palma est l’artère principale de ce quartier populaire où les bars à tapas offrent de délicieux poissons et crustacés, pêchés le matin même et préparés avec amour. Très apprécié par les Gaditans, le bar étroit « El Faro » est une excellente adresse (il est situé au 15 de la Calle San Felix). Attention, le week-end, il faut jouer des coudes pour accéder au Saint Graal, aux délicieuses préparations de produits de la mer. Nous avons aussi succombé aux mets proposés par la Taberna Casa Manteca (située au 66 de la Calle Corralon). Cette taverne a été fondée après la guerre par un ancien torrero, portant l’apodo « El Manteca » (qui signifie saindoux en français). Leur chorizo (« morcon de bellota ») et leurs couennes de porc arrosées de citron (« chicharrones ») vous laisseront un souvenir impérissable. Face à l’Atlantique, les maisons aux façades multicolores du Campo del Sur nous conduisent à la mythique Plage de la Caleta. 



Au bout du quartier, baignée par les brises soufflant, la délicieuse plage parsemée de barques colorées mouillant à l’abri du Fort de San Sebastian, nous attend. La Plage de la Caleta est un enchantement. Le Balneario de la Palma domine ce théâtre à ciel ouvert où il se passe toujours quelque chose d’extraordinaire. De cette plage au sable fin et doré et aux eaux paisibles qui s’étend à peine sur quelques dizaines de mètres, les couchers de soleil sont des expériences uniques. L’architecture de l’immaculé centre thermal de Nuestra Señora de la Palma et les fortifications défensives contribuent au charme du lieu. Il règne une ambiance familiale unique sur la seule plage urbaine de la vieille Cadix, nichée au sein de ce quartier de la classe ouvrière de la Viña. Délimitée par deux forteresses, nous tombons sous le charme de ce lieu aux allures de cartes postales où quand revient la marée montante, les dizaines de petites barques colorées amarrées dans le sable, flottent au gré des vagues. Magique…



Le Castillo de San Sebastian se gagne en empruntant un étroit chemin où par jour de grand vent, les vagues vous jouent des tours et ne manquent pas de vous rafraîchir. Bâtie pour protéger la ville, la forteresse emblématique abrite l’actuel phare et témoigne de son rôle passé de vigie.

De l’autre côté de la plage baignée de soleil, nous retrouvons un autre château aux allures coloniales1 , le Castillo de Santa Catalina, dont la construction fut commandée par Philippe II en 1597 et dont l’agrandissement un siècle plus tard est exécuté sous Charles II. Le lieu jadis défensif s’est mué en écrin culturel. Cet espace abrite des expositions temporaires, des concerts et des foires artisanales. Des étoiles plein les yeux, nous nous approchons de l’Arbre de Mora, un ficus centenaire (famille des arbres à caoutchouc géants) qui en réalité correspond à deux arbres plantés au même endroit et qui semblent s’entremêler. Nous quittons ce lieu légendaire car un écrin de verdure aux allures enchanteresses nous attend à quelques pas. C’est aussi l’occasion de pénétrer dans un autre quartier, dans le « Barrio del Mentidero ».



Une promenade qui touche à sa fin, rythmée par une succession de beautés…

Nous accédons dans le quartier «del Mentidero» en passant à côté du «Baluarte de Candelaria» (Bastion de la Chandeleur). Cette construction visant la protection du port de Cadix était à ses origines (fin du XVIème siècle) un petit édifice directement construit sur les rochers. Ensuite, une grande esplanade, des murailles et un mirador ont complété l’ensemble. Nous aimons le petit air d’Amérique du Sud qui se dégage de la belle Église del Carmen située face au bastion. Cet édifice religieux se démarque des autres temples de la ville par sa superbe devanture baroque rose et blanche. En face de celle-ci, nous empruntons la Promenade d’Apodaca qui conduit à un univers végétal de toute beauté.

Le Parc Genovés surprend par ses belles cascades, ses fontaines, sa collection de sculptures et son incroyable diversité botanique. Le poumon vert gaditan séduit aussi par les nombreuses espèces d’oiseaux que l’on croise aux abords de la «Gruta», son joli petit lac enchanteur. Nous rejoignons une autre place verte, la Place de Mina où de grands arbres ont été plantés. Cette riche végétation crée un oasis de fraîcheur. Nous retrouvons au centre de la place habillée de marbre, un joli kiosque au charme désuet dont le bleu semble assorti au ciel. C’est aussi là qu’a élu domicile le Musée de Cadix. Nous poussons avec fougue les portes de ce musée, impatients de découvrir les trésors qu’il renferme.

Le rez-de-chaussée est consacré à la collection la plus passionnante du lieu, à savoir la section archéologique. On y découvre par exemple que, jadis, Cadix possédait deux temples fascinants. Le premier était consacré à la déesse de l’amour et de la guerre, Astarté, la Vénus des Phéniciens. Le second retrouvé sur l’île de Sancti Petri, était dédié à Melqart-Hercule. Deux impressionnants sarcophages phéniciens nous captivent. Une grande partie de la collection intéresse aussi la période romaine avec notamment différents bustes de l’Empereur Hadrien et une statue aux dimensions colossales de Trajan. Nous sommes aussi surpris de découvrir au premier étage une très belle collection de Beaux-Arts avec notamment une série d’œuvres sur bois du maître du «réalisme baroque», Francisco de Zurbarán. Nous croisons aussi quelques chefs-d’œuvre de Murillo ou encore de Rubens. Décidément, cette ville de Cadix ne cesse de nous surprendre…

Avant de quitter la ville éclatante, nous passons à proximité du Grand Théâtre Falla dont la façade de brique est de toute beauté et admirons non loin de là, une dernière église, celle de San Antonio, ancien ermitage devenu paroisse à la fin du XVIIème siècle.

Nous terminons la découverte de la ville par le Monument « a las Cortes de Cadix » ou Monument de la Constitution qui trône fièrement au centre de la Place d’Espagne. Cette œuvre commémore l’anniversaire du premier centenaire de la Constitution de 1812, aussi appelée la « Pepa ». Rappelons que les libéraux espagnols réunis en un acte extraordinaire dans la ville, ont promulgué cette première constitution dans l’histoire du peuple espagnol ici à Cadix, proposant des idées très avant-gardistes pour l’époque. Son surnom découle du fait qu’elle a été signée le 19 mars, jour de la Saint Joseph. Pepa est le féminin de Pepe, diminutif familier de Jose (ou Joseph en espagnol). Le monument correspondant à un impressionnant hémicycle comporte notamment des statues équestres en bronze, allégories de la guerre et de la paix. Une figure d’Hercule s’y retrouve aussi, emblème de la ville. Nous saluons la figure centrale de ce monument pharaonique, une statue en marbre représentant une sage-femme vêtue d’une longue tunique tenant une épée et un document où figure la loi écrite. Le visage de celle-ci, aux traits hérités des arts gréco-romains, semble nous faire comprendre que Cadix nous remercie pour la visite. La ville aux mille et une conquêtes est parvenue à conquérir notre cœur. Nous repartons la tête pleine de souvenirs et nous promettons à la gardienne des droits et des libertés de revenir prochainement à Cadix, ville aux facettes multiples. La cité a encore tant de choses à nous faire découvrir…


« Viva la Pepa »

Trouvant ses origines dans les cris qui acclamaient la promulgation de la première Constitution espagnole, l’expression « viva la Pepa » a, comment dire, quelque peu évolué… Voyez plutôt… On qualifie aujourd’hui une chose ou une personne de « viva la Pepa » lorsqu’elle est source de désordre, incontrôlable ou encore elle s’associe à une personne qui ne s’implique pas ou qui semble ne se préoccuper de rien. « Nadie estudia en esta classe. Esto es un viva la Pepa » (par exemple : personne n'étudie dans cette classe, personne n'en a rien à faire)