Marais salés et oiseaux migrateurs...

Rédigé le 14/06/2025
Frederic André


Face à la mer, une étendue de marais salants vous attend avant de partir à la découverte des magnifiques plages de Cabo de Gata. Les salines de Cabo de Gata sont les seules encore en activité en Andalousie orientale, avec une production de plus de 40 000 tonnes annuelles de sel. Elles se sont formées lors du Quaternaire par le colmatage d’une plaine située entre les contreforts de la montagne et la mer Méditerranée. L’entrée des eaux et la force des vents provenant de l’ouest ont conduit à la naissance d’un magnifique lagon, exploité depuis des temps immémoriaux. C’est l’un des écosystèmes les plus uniques de la partie méditerranéenne espagnole. Les exploitations salines s’accélérèrent lors de l’époque romaine. Au milieu du XIXe siècle, elles sont aliénées par l’État avant d’être acquises par une société française en 1882. Début du XXe siècle, la famille espagnole Acosta rachète l’affaire. S’y distinguent aujourd’hui différents types d’étangs en lien avec leur fonction dans la production d’un sel très apprécié pour sa haute teneur en iode. Se succèdent dans le processus de fabrication du précieux condiment, des évaporateurs, des réchauffeurs, des concentrateurs et des cristallisoirs. Une barrière de dunes sépare cette zone si particulière des plages. L’apport d’eau de mer se fait par un système complexe de canaux, en profitant du dénivelé par rapport à la mer, et de nombreuses rampes y débouchent, apportant les eaux de pluie et celles de ruissellement.

Au-delà de ces aspects industriel et commercial, elles ont également une importante valeur écologique en étant l’habitat naturel de très nombreuses espèces animales et végétales. Ce sont plus de 100 espèces différentes d’oiseaux, dont de nombreux migrateurs, qui y trouvent refuge au fil des saisons. À quelques encablures, découvrez une petite église qui attire tous les regards. Elle semble avoir été déposée en ces lieux atypiques comme par magie. La grande dame, dont le beau clocher pointe vers le ciel azuré, observe inlassablement les bateaux…

La Iglesia de las Salinas porte également le doux nom de l’Église de l’Archange Saint Michel. Elle date du début du siècle dernier et fut construite pratiquement les pieds dans les marécages, face aux larges étendues de sable fin. Longtemps délaissée, le temple renaît de ses cendres en 2012 après une longue période de travaux, et l’activité liturgique reprend enfin. À la différence des autres bâtiments et habitations construits dans les salines, l’édifice religieux est érigé sur une plate-forme pour éviter l’entrée d’eau et de sable. Cette élévation lui confère d’ailleurs un petit air de supériorité symbolique. Stylistiquement, l’église se caractérise par la sobriété historiciste et l’éclectisme propre du début du XXe siècle à Almeria. Appréciez particulièrement son clocher à section carrée, surmonté d’une pyramide et d’une croix de fer. Son architecture semble inspirée des petites églises italiennes, ce qui est plutôt inhabituel ici dans la province, tant dans les zones rurales que littorales. La protectrice des marins, la Vierge del Carmen, y est vénérée tout comme Santa Bárbara.

Grues cendrées, flamants roses et autres volatiles vous attendent donc dans cette magnifique partie de Cabo de Gata. Les oiseaux y trouvent le repos lors de leur processus migratoire. Ils profitent des hivers tempérés de la zone avant de rejoindre des terres plus au nord quand vient l’été. Notons qu’en lien avec le changement climatique et le réchauffement, de plus en plus d’échassiers semblent se sédentariser dans cette zone plutôt humide. Au début de la période estivale, il n’est pas rare d’observer des colonies formées de milliers d’oiseaux. Retrouvez, cher lecteur, deux postes d’observation ornithologique logés dans cette zone permettant d’apprécier leurs envols et leur quotidien sans les déranger. Les 400 hectares de ce parc naturel salé vous invitent à un véritable dépaysement.