Mettons le cap sur le Récif des Sirènes, l’un des plus beaux joyaux de la province. Niché en plein cœur du splendide Parc Naturel de Cabo de Gata, el Arrecife de las Sirenas est une formation naturelle qui mérite le détour. Ce trésor se découvre au départ d’un belvédère dominant les falaises escarpées et qui offre un panorama unique sur la Mer Méditerranée (on y retrouve une petite office du tourisme). Ce lieu légendaire est considéré comme la partie la plus orientale du sud de l’Espagne. De nombreuses légendes entourent ce lieu mythique dont le nom découlerait de la présence de phoques moines présents jadis sur ce récif et que les anciens navigateurs pouvaient confondre avec des sirènes. D’un point de vue géologique, ces formations de pierre qui semblent jaillir de l’eau sont d’anciennes cheminées volcaniques sous-marines, ce qui explique leur couleur sombre. Lors de l’évolution accompagnée d’une baisse du niveau de la mer, elles se sont dévoilées au grand jour. L’érosion de l’eau salée et l’impact des vents ont conduit à la transformation de la physionomie de ces tubes pour le résultat spectaculaire que l’on connaît aujourd’hui. De petites étendues de sable fin et des plages rocailleuses sont également accessibles par un magnifique petit chemin de promenade. Des tronçons de guides de bateaux rouillés sont les témoins des importantes activités de pêche du siècle dernier. Quant à ces microscopiques plages laissant tout au plus la place à une dizaine de serviettes de bain, elles brillent par leur existence éphémère car très vite la marée haute les fait disparaître comme par magie, englouties entre ces cheminées géantes. Alors cher lecteur, ne faites pas l’impasse sur ce très beau lieu au doux nom de Récif des Sirènes lors de votre prochaine visite dans la région. Si par le plus grand des hasards, vous entendez le chant d’une sirène, ne vous pincez pas, vous êtes simplement à Cabo de Gata!
Les légendes qui circulent autour de cet endroit si singulier sont si nombreuses. Il existe tant d’histoires fantastiques autour de ce point le plus oriental du sud de la péninsule ibérique. L’une d’entre elles raconte qu’un pêcheur humble, bien connu dans son village et apprécié de tous, prenait quotidiennement la direction du récif pour pêcher dans ces eaux transparentes. Sa mère était décédée quelques années auparavant et il avait pris la décision de l’enterrer sur l’une des petites plages, à l’abri des criques. Ses sessions de pêche s’accompagnaient d’un véritable recueillement pour celle qu’il aimait tant. La paix et la sérénité que dégageait ce lieu le conduisaient à ne pêcher que dans ces eaux. Un matin d’hiver, comme à son habitude, le pêcheur prépare sa canne et son panier de pêche pour rejoindre son lieu de prédilection. Il escalade les rochers volcaniques, atteint le récif et s’installe sur une des pierres, la même qu’il choisissait tous les jours. Face à cette mer d’un bleu turquoise, seul le clapotis des vagues et le cri des mouettes rompent le silence régnant dans le récif. Tout à coup, un terrible cri brise le calme ambiant. Le pêcheur, surpris, tente de découvrir d’où vient cet hurlement, mais finalement n’y prête pas trop attention et rentre comme chaque soir chez lui. Le jour suivant, il répète sa routine quotidienne et une fois sur place, à peine installé, un cri similaire à celui entendu la veille brise le silence. Il se rapproche de l’eau et découvre une lumière brillante émerger des profondeurs. L’éclatant spectre semble se terminer par une longue queue de poisson aux écailles d’argent. Le pêcheur se frotte les yeux et discerne la silhouette d’une jeune femme qui se présente à lui. Sa longue chevelure verte et son corps sublime intimident le pêcheur. Sa voix veloutée semble l’envoûter mais en un instant, ce personnage extraordinaire disparaît. Le soir, le pêcheur rapporte au village l’épisode troublant de cette rencontre magique, mais personne ne croit à son histoire. Jour après jour, il se rendit à l’endroit de cette rencontre magique et jusqu’à la fin de sa vie, il garda l’espoir de recroiser cette créature étincelante, mais il n’en fut rien. Le pêcheur repose désormais aux côtés de sa mère et cette sirène qui a hanté ses jours et ses nuits veille sur lui pour l’éternité. En tous les cas, ce lieu d’une immense beauté porte depuis ce doux nom de Récif des Sirènes. Une autre légende circule et elle concerne l’ancienne colonie de phoques qui occupaient jadis le site. Ces animaux sont en voie d’extinction, cette espèce « moine » n’est plus présente en Espagne. Ils avaient l’habitude, entre leurs sessions de chasse marine, de se reposer le ventre plein sur les rochers volcaniques du récif. La posture qu’ils prenaient évoquait la silhouette des sirènes et les marins rapportaient que leurs cris atteignaient des aigus comme ceux d’une voix féminine. L’alcool aidant parfois, il n’était pas rare que certains pêcheurs rapportaient dans les bars des villages de pêche des histoires de sirènes, où mammifères phocidés étaient pris pour de jolies femmes à la queue de poisson.