Se soigner en Espagne suscite de nombreuses interrogations. Quelle est la qualité des soins ? Comment fonctionne le système de santé avec ses deux axes, le privé et le public ? Doit-on réellement s’armer de patience pour pouvoir être soigné ? Esprit Sud Magazine fait le point et vous éclaire sur le fonctionnement du système de santé dans le sud, entre mythe et réalité…
Il n'est pas rare d'entendre que de nombreux expatriés, installés ici dans le sud, font le choix de conserver leurs soins de santé dans leur pays d’origine. Ils organisent dès lors en fonction de leurs différents rendez-vous médicaux leurs voyages. Alors, peur de l’inconnu ou soins de qualité faisant réellement défaut, on peut s’interroger. Lorsque l’on s’intéresse à la qualité du système médical espagnol (les soins de santé sont payés par le contribuable via le système de la sécurité sociale), les informations récoltées sont unanimes. L’Espagne se classe parmi les meilleurs pays au monde. Selon l’indice Bloomberg 2019 Healthiest Country, la nation est en tête de la liste des pays les plus sains au monde avec une espérance de vie moyenne de 83 ans, dépassant tous les autres états membres de l’Union Européenne. L’indice des soins de santé a classé l’Espagne en 2021 au huitième rang sur 89 pays. En Europe, seuls le Danemark et l’Autriche font mieux que l’Espagne. De plus, le pays trône au premier rang mondial pour les transplantations d’organes. Le système de santé est donc efficace et performant même si tous n’en bénéficient pas de manière équitable. Son principal point faible est qu’il est clairement déficitaire à certains endroits. De plus, si vous avez besoin d’une aide médicale spécialisée, comme celle d’un dentiste ou d’un professionnel de la santé mentale, il est pratiquement impératif d'avoir recours au système privé.
D’une manière générale, l’Espagne dispose d’un système de santé de qualité garantissant une couverture à tous les résidents. Universalité, libre accès et équité en sont les principes fondateurs. La population bénéficie donc de soins de santé publique (una asistencia sanitaria pública), à travers du Système National de Santé (SNS). Toute personne qui vit ou travaille en Espagne (salariée ou indépendante) doit pouvoir jouir gratuitement des soins de santé publique. S’y ajoutent les enfants, les femmes enceintes, les personnes à la retraite avec une pension d’État et les étudiants de moins de 26 ans. Il est organisé en deux niveaux. Le niveau national, à travers du Ministère de la Santé (Ministerio de Sanidad), dicte les lois et les règlements et établit les budgets alors que le niveau régional, réparti sur les 17 régions autonomes, se charge de superviser l’administration locale des services de santé. L’organe qui coordonne est le Conseil Interterritorial formé par le Ministre espagnol de la Santé et les 17 Ministres régionaux de la Santé. Plus de 70% du système de santé trouvent un financement dans les impôts publics. Cela représente plus de 11% du Produit Intérieur Brut. Même si la qualité des soins ne semble pas, dès lors, pas remise en question, de plus en plus d’Espagnols et d’expatriés installés dans le sud confient leur santé au secteur privé. Si en 2015, un cinquième de la population espagnole disposait d’une couverture privée (seguro de salud privado), ce sont 26% qui en 2024, ont fait le choix de ce secteur, soit plus de 12 millions de personnes. L’assurance médicale privée est contractée auprès d’un organisme assureur moyennant le paiement d’une prime (mensuelle ou annuelle), qui donne accès à une couverture médicale «sur mesure». L’assurance sin copago (sans co-paiement) est une prime unique versée pour les services médicaux, et ce, peu importe le nombre de fois où ils sont utilisés. L’assurance con copago (avec co-paiement) est cette option où une petite somme, en plus de la prime d’assurance-maladie privée, est versée à chaque fois qu’un service est utilisé ou un soin contracté. Ces services médicaux sont dispensés dans des centres ou établissements agréés par l’assureur. Ce dernier éclaire son client par le biais d'une liste complète des prestations mises à sa disposition. Cela inclut les hôpitaux, les cliniques et les professionnels de santé. L’assurance-maladie privée peut aussi offrir des services où l’assuré choisit lui-même dans quel centre médical et avec quels professionnels il souhaite être soigné. C’est une option de remboursement qui est alors d’application. Le client choisissant librement le médecin ou le centre, paie donc à l’avance les coûts résultant des soins qu’il reçoit et présente ensuite le montant à l’assureur qui le rembourse conformément à la police contractée. De plus en plus de personnes faisant le choix d'une assurance médicale privée, optent pour cette seconde option, appréciant cette capacité de réaliser ce choix librement. L’âge de la personne, la couverture choisie et le principe du copaiement ou non sont les facteurs qui influencent le prix des assurances médicales privées en Espagne.
Les « centros de salud » s'inscrivent dans un système de soin de proximité
En cas d’urgence, les gens doivent se rendre directement à un hôpital public pour y recevoir des soins médicaux. Pour tout autre type de traitement hospitalier ou de soin, c’est un médecin « référent » qui vous guide au cœur d’un centre de santé. Le centro de salud vous est généralement attribué par code postal. Les Espagnols sont habitués à se rendre, dès l’enfance, au même centre ambulatoire pour y retrouver leur médecin de référence. Cela implique que lorsque l’on déménage et change de domicile, un nouveau centre et un nouveau médecin-référent vous sont attribués. Sur le lien suivant, il est possible de trouver votre centre de santé en Andalousie : www.sspa.juntadeandalucia.es/servicioandaluzdesalud/el-sas/ servicios-y-centros/informacion-por-centros. Les soins de base et initiaux y sont donc garantis avec une continuité de soins tout au long de la vie du patient. Ces centres de santé assurent toutes les activités d’assistance en matière de soins individuels, de diagnostic, de thérapie et de suivi des processus aigus ou chroniques. Ils jouent également un rôle majeur en prophylaxie, promotion de la santé et éducation.
La situation des non-résidents et des voyageurs en Espagne sous la loupe !
Les ressortissants de l’UE/AELE (Association européenne de libre-échange élargie à l’Islande, le Liechtenstein, la Norvège et la Suisse) peuvent bénéficier gratuitement de soins avec la carte d’assurance-maladie européenne (CEAM). Les ressortissants d’un pays tiers devront quant à eux contracter une assurance voyage et santé dans le cadre de leur demande de visa. La simple carte européenne de couleur azurée est donc essentielle lors de votre séjour dans le sud de l’Espagne. Demandezla dans votre pays d’origine à l’organisme de sécurité sociale auquel vous êtes affilié et en Espagne, vous pouvez présenter votre carte à n’importe quel médecin ou hôpital public, afin de recevoir des soins gratuits ou à un coût réduit. Cette carte européenne d’assurancemaladie permet donc de bénéficier de soins urgents (ou les soins continus nécessaires lors d’une affection grave, par exemple dans le cas d’un diabète ou lors de dialyses) aux mêmes conditions qu’un résident local. Attention, chaque membre de la famille doit disposer d’une carte individuelle et celle-ci a une durée limitée dans le temps, alors n’oubliez pas de la renouveler avant votre voyage ou séjour prolongé en Espagne ! Lors de votre passage aux services d’urgence, vous ne déboursez rien. Chez un médecin, vous payez généralement votre consultation qui vous sera remboursée à votre retour selon la politique de santé de votre pays d’origine.
Des soins de santé universels, un concept à nuancer!
Trois alternatives à ces prestations de soins de santé universels existent. Elles portent le nom d’assurance maladie volontaire substitutive, d’assurance maladie volontaire complémentaire et d’assurance maladie volontaire supplémentaire. Prenons l’exemple des personnes qui travaillent dans la fonction publique espagnole, elles sont libres de bénéficier de soins de santé universels ou pas et dès lors d’accepter une seconde option, une assurance-maladie subventionnée par le gouvernement. C’est ce que l’on appelle ici une assurance maladie volontaire substitutive. La seconde option est une couverture volontaire complémentaire et celle-ci entre en jeu lorsque le citoyen utilise le système classique mais souhaite une assurance privée supplémentaire afin de couvrir certaines prestations non couvertes par le régime classique (par exemple des soins dentaires, gynécologiques, …). Enfin, l’assurance maladie volontaire complémentaire est une troisième option pour les Espagnols qui utilisent les soins de santé classiques disponibles, mais ils optent également pour une assurance privée supplémentaire leur offrant des avantages supplémentaires surtout en matière de délais. Ils ont par cette occasion, le « luxe » d’obtenir des traitements plus rapides et donc mieux disponibles. Ce système peut faire grincer les dents… Les inégalités se produisent donc non seulement dans les domaines qui ne sont pas couverts par le système classique (comme les soins dentaires) et traduisent véritablement une santé à deux vitesses, favorable une nouvelle fois aux plus fortunés.