Mustii a enfin dĂ©voilĂ© âBefore The Partyâs Overâ, la chanson qui reprĂ©sentera la Belgique Ă lâEurovision cette annĂ©e. Cette « ode Ă la vie et Ă la rĂ©silience » lui ressemble bien plus quâelle nâest un pur produit « Eurovision » et on sâen rĂ©jouit. 38 ans plus tard, lâartiste bruxellois nous propose donc la version sombre de « Jâaime la vie » et pourrait dĂ©jouer tous les pronostics. Le poids est lourd sur ses Ă©paules tant il ne veut pas dĂ©cevoir son pays avec ce message dâouverture qui invite Ă sâassumer pleinement.
Le parcours de Thomas Mustin, le vrai nom de Mustii, sâaccĂ©lĂšre dĂšs la fin de ses Ă©tudes de cinĂ©ma. Dans "Je voulais juste rentrer chez moi" pour France 2, Thomas Mustin crĂšve l'Ă©cran, aux cĂŽtĂ©s d'une Mathilde Seigner trĂšs convaincante. L'acteur est brillant, donnant toute l'authenticitĂ©, l'intensitĂ© et lâĂ©motion nĂ©cessaire Ă ce rĂŽle compliquĂ©. Le cinĂ©ma voit en Thomas Mustin un acteur talentueux et ce dernier multiplie les rĂŽles (dans « Grave », « Un Petit Boulot », « Vous nâaurez pas ma haine » ou encore «L'Ă©change des Princesses» pour lequel il dĂ©croche le Magritte du Meilleur Espoir Masculin du CinĂ©ma Belge).
AprĂšs deux albums, de nombreuses piĂšces de thĂ©Ăątre, des rĂŽles marquants au cinĂ©ma et au petit Ă©cran et Ă©galement une rĂ©crĂ©ation quâil sâest offerte dans « Drag Race Belgique » oĂč il est membre du jury, Mustii se prĂ©pare Ă vivre trois mois intenses qui le conduiront sur la scĂšne de la Malmö Arena en SuĂšde oĂč il dĂ©fendra dĂ©but mai les couleurs de la Belgique. Quant au morceau «Before The Partyâs Over», il sâavĂšre addictif et plus on lâĂ©coute plus on rĂ©alise la puissance et la force tant de la mĂ©lodie que des paroles, des qualitĂ©s qui peuvent le conduire Ă sĂ©duire la large audience de ce show mondial. Alors, 2024, une annĂ©e Mustii?
Bonjour Mustii, comment vous sentez-vous, quelques heures seulement aprĂšs avoir dĂ©voilĂ© ton titre « Before The Partyâs Over » ?
Je suis un peu submergĂ© par les Ă©motions car câest trĂšs fort, trĂšs intense depuis le lancement de la vidĂ©o. Les retours sont vraiment trĂšs positifs et je puise dans mes rĂ©serves face Ă toute cette belle Ă©nergie. En mĂȘme temps, jâessaie de ne pas trop mâemballer non plus et je reste concentrĂ© car la route jusque Malmö est longue. Il faut garder les pieds sur terre par rapport au travail qui reste Ă faire. Je suis content de l'accueil rĂ©servĂ© Ă la chanson, les rĂ©actions sont trĂšs touchantes. Certains m'ont envoyĂ© des messages pour me dire que cette chanson tombe au bon moment dans leur vie, quâils peuvent s'y projeter. C'est un partage dâĂ©motions fortes
Ce sont en effet trois mois intenses qui vous attendent, rythmĂ©s par cette chanson âBefore the partyâs overâ, une collaboration avec lâauteur compositeur liĂ©geois Pierre Dumoulin qui a travaillĂ© notamment avec Blanche pour âCity lightsâ. Vous nous expliquez lâhistoire de cette chanson, le message quâelle comporte?
La chanson peut ĂȘtre lue de maniĂšre diffĂ©rente. Le thĂšme principal câest bien Ă©videmment la rĂ©silience. Je me suis inspirĂ© dâune piĂšce dans laquelle jâavais tenu un rĂŽle lors de la fin de mes Ă©tudes de thĂ©Ăątre Ă lâIAD. Il sâagit de cette Ćuvre de Anton Tchekhov, « Les trois sĆurs », oĂč Ă la fin, Macha lâune des trois sĆurs dit de la vie quâelle peut ĂȘtre violente, quâon ne comprend pas tous les tenants et les aboutissants, mais quâil faut vivre. Jâaimais ce contraste entre ce constat mĂ©lancolique, inquiet des choses, un chemin semĂ© d'embĂ»ches et de moments violents mais en mĂȘme temps, il est possible dâencaisser, on parvient Ă lutter et donc on nâa pas le choix, il faut vivre.
A-t-on vĂ©ritablement le choix ? Il faut vivre de la maniĂšre la plus intense possible, câest ça le messageâŠ
Exactement, il faut essayer de se libĂ©rer de ses chaĂźnes et crier au monde qui on est vraiment sans avoir peur. Et c'est vraiment le message que je voulais donner parce que malgrĂ© l'aspect un peu mĂ©lancolique et sombre que cette chanson peut avoir, je pense quâil y a une force vitale qui Ă©merge Ă la fin et câest vraiment ce que je voulais avec un cĂŽtĂ© Ă©pique, voire dramatique.
Cette force de vivre et lâurgence, aussi, qui est rĂ©pĂ©tĂ©, martelĂ© dans cette chanson âŠ
Câest un vĂ©ritable cri, je le rĂ©pĂšte, avec ce sentiment dâurgence. Et ce « Before », câest lâavertissement, on nâa pas le temps de faire des dĂ©tours ou de se cacher, pas le temps non plus de revĂȘtir une armure⊠Le parcours est certes, compliquĂ©, mais il faut chercher son feu intĂ©rieur et le montrer. Je trouve que ce message est symboliquement fort, vraiment puissant pour une scĂšne comme celle de l'Eurovision. Et toutes ces voix Ă la fin avec les phrases rĂ©pĂ©tĂ©es avec les diffĂ©rents accents, je trouve cela trĂšs beau, trĂšs touchantâŠ
En plus, cette chanson sâintĂšgre parfaitement dans le thĂšme de cette annĂ©e Ă lâEurovision qui est « United by Music ».
Oui avec toutes ces personnes du monde entier qui prononcent ces phrases, jâĂ©tais vraiment Ă©mu dâentendre tous ces accents, sur ces paroles « I got the soul on fire », « Iâm gonna make moves tonight » qui se rĂ©pĂštent. Câest un vĂ©ritable hymne Ă la vie.
Vous succĂ©dez Ă lâAnversois Gustaph qui a dĂ©crochĂ© la septiĂšme position et a aussi placĂ© haut le curseur de la gay attitude lâan dernier. Vous savez que lâEurovision câest une chanson mais câest aussi tout un univers, un costume, des chorĂ©graphies, une mise en scĂšne, « Before The Partyâs Over » est parfaite pour cocher toutes ces cases.
Bien entendu, dâailleurs pour tous mes projets musicaux, j'ai en tĂȘte un univers. Faire de la musique pour moi, câest aussi puiser dans le thĂ©Ăątre, le cinĂ©ma, câest de l'acting. Cela me vient gĂ©nĂ©ralement dĂšs le dĂ©but du processus en fait. Et lĂ en plus quand j'ai su que c'Ă©tait pour lâemmener Ă l'Eurovision, ça fuse dans tous les sens. DĂšs le dĂ©but, je passe par un moodboard 1 avec ce que j'imagine comme types de couleurs ou comme types de mises en scĂšne.
A quoi peut-on sâattendre, tu vas nous en dire un peu plus sur ce qui nous attend pour ta performance Ă lâEurovision ?
Câest un peu tĂŽt pour rĂ©vĂ©ler les dĂ©tails mais ce que je peux vous dire câest que diffĂ©rents indices se trouvent dans le clip. Il y a la chanson mais il y aura un univers pour le « staging », car cela doit ĂȘtre accrocheur, visuellement parlant. On gagne aussi ce concours pour ces Ă©lĂ©ments- lĂ . Dans la mise en scĂšne, il y aura aussi cette espĂšce de montĂ©e en tension pour, au final, lĂącher les chiens. Ce sera tout sauf un encĂ©phalogramme plat. Le challenge sera aussi de traduire esthĂ©tiquement et artistiquement la chorale qui ne peut pas mâaccompagner sur scĂšne.
Quâest-ce quâĂ©voque pour vous ce concours ? Vous nâĂ©tiez pas encore nĂ© quand en 1986 Sandra Kim remporte pour la seule et unique fois le concours pour la Belgique...
Le concours, je le regardais avec mes parents quand j'Ă©tais petit. Puis, j'avoue avoir un peu perdu le fil et j'ai repris, de maniĂšre plus assidue, il y a 3 ou 4 ans. Il y a eu notamment cette performance incroyable de Maneskin pour lâItalie en 2021. Je les sentais tellement libres sur scĂšne, ils ont livrĂ© quelque chose de puissant, de tellement authentique. Ăa mâa vraiment donnĂ© lâenvie d'y aller. Je suis plus sĂ©duit par cette maniĂšre dâenvisager le concours par rapport Ă une approche plus kitsch. Dâailleurs, les derniĂšres annĂ©es, câest devenu un show exceptionnel et musicalement, câest hyper intĂ©ressant
Câest vrai, les pays prennent cela avec beaucoup de sĂ©rieux et les sĂ©lections nationales sont trĂšs suivies. Ici en Espagne, le Benidorm Festival ou le Festival San Remo en Italie sont des Ă©vĂ©nements extrĂȘmement suivis.
TrĂšs clairement, je suis d'accord avec toi et puis il y a un beau challenge ici en Belgique, pays assez compliquĂ© avec les diffĂ©rentes communautĂ©s. Je trouvais intĂ©ressant dây aller avec cette idĂ©e d'unitĂ©. Prenons mon Ă©quipe crĂ©ative, elle est composĂ©e de Flamands, de Bruxellois et de Wallons. Câest pour moi symboliquement fort, montrer cette belle unitĂ©
Sans transition, quoi que, quelles ont été les raisons qui vous ont conduites à devenir juge dans Drag Race Belgique?
Tout dâabord, je suis un grand fan du milieu Drag. Je vais souvent voir des spectacles au cabaret Mademoiselle de Bruxelles. Jâaime ces artistes, je les trouve inspirantes. Elles doivent tout maĂźtriser et elles gĂšrent les rĂ©fĂ©rences Pop Culture comme personne. Elles sont les reines de lâacting, de l'humour, de la danse, de la mode et donc pour c'est pour moi, en tant qu'acteur et musicien, extrĂȘmement inspirant. Je suis aussi un spectateur de base et les yeux Ă©carquillĂ©s sur le plateau, je suis comme un enfant dans un magasin de jouets. Pourtant, Ă la base, je m'Ă©tais toujours dit que je ne ferais jamais une Ă©mission de tĂ©lĂ©rĂ©alitĂ©, car ce n'est pas mon truc.
Par pudeur ?
VoilĂ , c'est ça et dans ce cas le fait effectivement qu'il y ait un plus, le cĂŽtĂ© social, lâapproche extrĂȘmement humaine, cela est Ă©norme. Les valeurs, lâintĂ©gration, lâacceptation, tout cela est dĂ©livrĂ© au mainstream, au grand public. Câest donc pour moi bien plus quâune tĂ©lĂ©rĂ©alitĂ©, câest une maniĂšre d'entrer dans les foyers de monsieur et madame tout le monde et de leur montrer quâil existe des parcours diffĂ©rents. Et puis, les jeunes peuvent aussi sâidentifier, ils savent quâils ne sont pas seuls.
Connaissez-vous Torremolinos? La station balnéaire sera la capitale Euro Pride en 2027.
Non, je ne suis jamais allĂ© Ă Torremolinos, mais je connais la chanson de Sttellla, elle est trĂšs connue en Belgique. Mais jâaccepte ton invitation.
La chanson « Before The Partyâs Over » ne se veut pas ĂȘtre hymne gay mais a tout pour le devenir.
Oui car les thĂšmes qui y sont dĂ©veloppĂ©s peuvent parler Ă la communautĂ© LGBTQIA. En 2024, câest terrible car il y a encore des jeunes qui sont rejetĂ©s pour lâorientation sexuelle. Il y a un refuge 1 qui a Ă©tĂ© crĂ©Ă© Ă Bruxelles, accueillant des jeunes rejetĂ©s. Expliquer pour rendre visible... Il y a encore beaucoup de travail.
Artiste androgyne, David Bowie est dâune grande influence pour vous, notamment ce fut le cas dans la composition de votre album âItâs Happening Nowâ. Vous en parlez assez rĂ©guliĂšrement avec ce parallĂ©lisme entre vous et lâartiste avec la schizophrĂ©nie dont souffrait votre oncle et celle qui a touchĂ© son frĂšre. Quâest-ce qui vous fascine tant dans lâunivers de Bowie ?
Jâaime tout dâabord le fait que cet artiste est toujours sorti de sa zone de confort, en transformation permanente. Il peut sortir un album de rock industriel et puis deux ans plus tard un truc de drum and base pour finalement, lâannĂ©e suivante revenir Ă une crĂ©ation POP commerciale. Jâaime sa position dâĂ©lectron libre qui utilise les outils artistiques en donnant l'impression que tout est possible. Et puis, il y a lâunivers Bowie, avec la transformation et bien entendu cela me parle aussi car je viens de l'acting, du cinĂ©ma, du thĂ©Ăątre.
Quel est lâalbum de Bowie dont tu ne pourrais te passer ?
Un album que je trouve incroyable, qui va rester, je pense, mĂȘme si ce nâest pas le plus accessible, c'est « Outside ».
Excellent choix, une derniĂšre question cĂŽtĂ© cinĂ©, cette fois, vous serez Ă l'affiche du prochain film de Michiel Blanchart, âLa nuit se traĂźneâ aux cĂŽtĂ©s notamment de Romain Duris. Vous pouvez nous en dire plus sur le rĂŽle que vous allez interprĂ©ter.
Je jouerai un vrai sale type et j'aime bien ce type de rĂŽle. C'est ce que je prĂ©fĂšre, ici, cheveux rasĂ©s, grills en mĂ©tal dans les dents, on me demande de me salir dans un champ, d'ĂȘtre Ă l'opposĂ© de ce que je suis. Et lĂ , pour le coup, on est Ă lâopposĂ© de Drag Race, câest le grand Ă©cart (rires). Je l'ai fait aussi parce que le scĂ©nario est trĂšs bien Ă©crit. Câest un thriller qui se dĂ©roule la nuit, une vĂ©ritable descente aux enfers. Mon personnage nâaurait jamais dĂ» mettre les pieds dans un engrenage et tout le film tourne autour de cette chute durant une nuit entiĂšre.
Merci Mustii, nous croisons les doigts pour la SuÚde et bon travail pour la préparation du concours.