Rencontre avec Christophe Brachet : photographe plateau

Rédigé le 01/01/2024
Frederic André

Esprit Sud Magazine est allé à la rencontre d’un homme passionné. Écouter parler Christophe Brachet de la photographie est magique. Depuis plus de quinze ans, il passe de plateau en plateau et capte le regard des plus grands acteurs. Le photographe talentueux a une double actualité car tout d’abord, il expose une série de clichés au Musée de Nerja en collaboration avec l’antenne de Nerja de l’Alliance Française de Malaga (jusque ce dimanche 18 février donc dépêchez-vous !) mais il est aussi le photographe plateau de la nouvelle série pour France 2 sur Zorro qui se tourne actuellement dans la province de Almeria. Il nous dévoile les coulisses des premiers jours du tournage auquel participe l’acteur oscarisé, Jean Dujardin. Alors, en selle, pour découvrir cette profession de photographe de plateau et en savoir un peu plus sur ce doué de la pellicule. Des photographies magnifiques, signée d’un B, qui veut dire Brachet ! 



Bonjour Monsieur Christophe Brachet, tout d’abord merci de m’accorder cette interview sachant que vous êtes très occupé en ce moment. Comment allez-vous ?

Merci beaucoup, je vais bien. Oui le tournage est fatiguant et très intense mais c’est très intéressant, vraiment un beau projet. On tourne pour cette série pendant 72 jours alors que pour un long métrage on tourne généralement une quarantaine de jours. Cela représente 6 mois de tournage à peu près, donc c'est vrai que c'est assez long et très intense. Il y a beaucoup de choses à faire dans cette série avec de nombreux décors, tous très différents, c’est un tournage vraiment très intéressant. Dimanche par exemple, c’était un day-off et plutôt que de partir visiter le coin, je me suis reposé plus qu'autre chose. Certains membres de l’équipe sont partis à la découverte de la région mais moi, je suis resté à l'hôtel et j’ai aussi débuter le traitement des images, il y a quand même des choses assez techniques qui doivent se faire.

Les lieux se prêtent parfaitement à cette série, on ferme les yeux et on imagine déjà Zorro arriver au galop dans le désert d’Almeria.

Oui exactement, moi je ne connaissais pas cette partie de l’Espagne et c’est vrai que c’est assez incroyable. Je peux venir chercher des profondeurs de champ avec les montagnes en arrière-plan, très arides et très belles. Cela donne une impression très particulière sur l'image. En un mot, je m'éclate !

Comment se passe ce début de tournage?

Pour l’instant tout se déroule à merveille. On est vraiment qu’au début puisque l’on tourne jusqu’à la mi-mars, on est à la fin de la première semaine et tout va bien. On est arrivé avec l’équipe le mercredi 7 février et le lendemain on commençait déjà à tourner.

Donc d’excellentes premières impressions…

Oui en effet. Nous sommes venus ici pour chercher des décors qui sont totalement atypiques. Et ça, c'est vraiment assez extraordinaire. On cherchait aussi le beau temps, on ne va pas se mentir les conditions sont excellentes. On a débuté le tournage à Madrid et nous sommes très contents d’être ici dans le sud de l’Espagne et de tourner avec ces conditions climatiques. Beaucoup de scène sont prévues en extérieur donc les conditions sont parfaites.  

Les décors ont-ils été créé pour cette série ou vous utilisez des décors déjà existants ?

L’idée, c'était effectivement de venir dans cet endroit mythique et de tourner dans des décors qui existaient déjà. Ils ont été juste relookés pour la série. Je trouve cette approche très positive et innovante car on ne construit pas de nouveaux décors. Il est rare que le cinéma se pose ce genre de question-là, comment peut-on réutiliser des choses… Cela est plutôt nouveau mais la conscience de l’empreinte carbone commence à germer et c’est une excellente chose. On travaille donc sur les décors créés pour le film de Ridley Scott, « Exodus », il y a une dizaine d’années. C’est intéressant d’un point de vue environnemental de réutiliser les choses car je le répète c’est quelque chose de très rare dans notre milieu pour l'instant, donc quand cela se fait, cela mérite d’être souligné.

On espère une série avec des cavalcades et des scènes, façon western, cela vous demande une approche particulière en tant que photographe ?

En effet, pour les mouvements du cheval notamment. Je ne suis pas cavalier et je travaille en partenariat avec toute une équipe de professionnels, des dresseurs, afin de savoir qu'est-ce qu'il faut prendre dans le cheval et pas prendre, quelles positions saisir... Donc dès que Jean Dujardin est au galop par exemple, quelle est la meilleure position à prendre du cheval ? À quel moment il faut le prendre ? C’est un long travail pour être le plus juste possible. Même si le spectateur ne s’en rend pas compte mais c’est effectivement relativement précis finalement. Les chevaux ont une façon particulière de courir avec des arrondis de pattes très spécifiques par exemple. Il faut aussi dans leurs attitudes bien les surveiller, comment se positionnent leurs oreilles. Tous ces détails-là, je les travaille avec les éleveurs et les cascadeurs de l’équipe de Mario Luraschi. Il est quasiment sur toutes les plus grosses productions cinéma, françaises et étrangères.


En effet, c’est le dresseur incontournable, un monument de l’ombre du cinéma. Christophe Brachet, vous nous expliquez un peu votre parcours ? Comment êtes-vous devenu photographe de plateau ? Il y a une rencontre qui va changer votre vie. C'est celle de Dominique Besnehard.

Je viens du sud-ouest de la France, j’ai grandi dans un petit village à côté de Bordeaux et après des études sportives avec spécialité plongée et surf et les monitorats en poche, je suis parti en Martinique. J’ai découvert la photographie à l'âge de 20 ans, c’était de l'Argentique, ce n’était pas la même façon de photographier qu'aujourd'hui. J’ai eu la chance qu'on me prête un appareil photo lors d'un voyage en Égypte, où j’ai fait mes premières photos sous l’eau et c’est  là que tout a commencé avec la photographie aquatique. Cela m'a tout de suite plu, c’était une pellicule en noir et blanc. Et pendant les 10 années où j’étais en Martinique, j'ai toujours continué à faire de la photo. L'envie du cinéma était tellement forte que j'ai décidé de quitter la Martinique pour venir m'installer à Paris. Je voulais faire du cinéma mais sans savoir quoi exactement. Et effectivement, je fais cette rencontre de Dominique Besnehard à Paris qui a changé beaucoup de choses pour moi car il m’a repéré dans une école d'acteurs. Il trouvait que j'avais quelque chose qui était intéressant. Il m'a proposé de passer un casting, mais celui-ci s’est mal passé. A la sortie du casting, j’ai dit à Dominique que j’avais raté le casting, mais que voulais bien faire des photos sur le film. Il m’a envoyé sur le plateau du film qu’il produisait les jours où le photographe plateau n’était pas là.  C’était le film « Avant l’aube » avec Jean-Pierre Bacri.

Du culot et finalement cela a payé…

Oui, il m’a dit « mais tu n’as jamais fait de la photo cinéma » ? Je lui ai répondu, « peut-être pas mais je sais photographier les requins et je pense que je devrais être capable de photographier un acteur sur un plateau ». La chance que j'ai eu est celle que mes photos ont plu à Jean-Pierre Bacri qui après m'a recommandé ensuite à d’autres acteurs et de fil en aiguille, j’ai rapidement travaillé alors que tout le monde m'avait dit « tu ne connais personne dans le cinéma, ce sera difficile ». Je suis venu avec mon instinct. Je suis venu avec ma façon de faire aquatique qui je pense a beaucoup plu aussi et qui plaît toujours. Je pense que si je travaille aussi beaucoup aujourd'hui, c'est parce que j'ai une façon de faire qui découle de mon travail de photographe aquatique.



Vous voulez dire que l’on approche un acteur sur un plateau comme on approche un requin sous l’eau ?

C'est exactement cela, avec beaucoup de respect, avec beaucoup de bienveillance et surtout avec énormément de discrétion. Et ça c'est le maître mot de mon métier. Donc toutes ces sessions sous l’eau m'ont énormément servi.

Dominique Besnehard vous a donc fait confiance…

Oui, il m’a fait bossé sur les films qu’il produisait et il m'a surtout confié très rapidement les clés de la photo au festival du film d'Angoulême. Donc ça fait 15 ans maintenant que je fais les photos du festival du film d'Angoulême et que je travaille dans ce milieu. C'est vraiment une grande histoire de confiance. Dominique est un peu mon papa de cinéma quoi.

Quelles sont les spécificités d'un photographe de plateau ?

Il y a beaucoup de choses. Tout d’abord, le métier a beaucoup changé. Avant, on prenait le temps sur un plateau de cinéma. Par exemple, il y a une quinzaine d'années, toutes les scènes étaient refaites pour le photographe, c'est à dire qu’une fois qu'une séquence était bouclée, on refaisait jouer la scène pour le photographe. Aujourd’hui, tout est une question de moyen et on réalise plus de choses en une journée qu'avant. Progressivement, on nous a demandé de faire les photos pendant les prises. Ce qui a ses avantages aussi car par le passé, pendant ces séances de photos, certains acteurs s’économisaient. Ils gardaient du jus pour la suite et cela est compréhensible sachant que ce sont des journées intenses pour eux. De ce point de vue-là, je pense que on y a gagné à faire des photos pendant les prises car il est intéressant de constater qu'au fur et à mesure des prises les choses s'améliorent. Je fais des photos tout au long des prises et j'essaie de garder les photos qui vont correspondre aux séquences qui sont sélectionnées par le réalisateur. Celui-ci dit à sa script, on garde telle prise et donc j’essaie d’être attentif à cela et de travailler dans ce sens-là. On comprend assez facilement qu'il faut être totalement silencieux, ce qui implique du matériel qui ne fait aucun bruit pour ne pas déranger les acteurs et le preneur de son. Deuxièmement, il faut une totale discrétion pour ne pas déranger un acteur, c'est le maître mot pour toute l'équipe qui tourne autour de lui, que ce soit le cameraman, la perchiste ou le preneur de son, la pointeuse, tous doivent respecter cela car c’est compliqué pour un acteur de jouer face à 50 personnes devant lui. Ce sont des choses hyper importantes à comprendre si l’on veut faire ce métier aujourd'hui, saisir comment fonctionne un plateau de cinéma. Moi, j’essaie d'être beaucoup sur les sensations, sur le ressenti, savoir à quel moment je peux faire des choses et ceux où je ne peux rien faire. Mais il y a des moments où je vais pouvoir me mettre dans le regard d'un acteur. J’ajouterais que pour faire ce métier, il faut aussi une certaine sensibilité je pense mais c’est le cas de beaucoup de métiers artistiques.  

Une question plus technique pour les professionnels de la photographie qui liront votre interview, quel est votre appareil de prédilection ? Ce doit être un appareil silencieux donc hybride… quel est votre appareil fétiche ? Sony Puisque vous êtes un de leur plus grand ambassadeur.

J’ai débuté avec les appareils Sony car sur le marché, la marque a été une des premières à croire aux appareils photos hybrides et donc totalement silencieux alors que les autres ne juraient que par les reflex. J’ai tout de suite cru en cette technologie car j’ai vu l'intérêt pour ma profession d'avoir des appareils photos beaucoup plus compacts et bien entendu silencieux. Cela reste un sujet assez tabou dans le milieu de la photographie, je veux parler de la taille des boîtiers entre les mains. Un gros boîtier, cela fait plus professionnel. Je trouve ça plutôt drôle. J’ironise souvent là-dessus avec cette envie de dire, vous avez un problème avec la taille, si vous voulez on en discute… Je pense qu'aujourd'hui un photographe qui recherche la compacité, la rapidité d'exécution d'un boîtier, c'est à dire un autofocus qui travaille bien, une bonne montée en sensibilité peut aller vers un Sony.  Je travaille avec un Sony Alpha One et j’ai aussi l'Alpha 9 Mark3 qui est sorti il n’y a pas très longtemps. Donc, je jongle avec 2 boîtiers qui sont assez complémentaires. J’utilise sur ce tournage ce deuxième et nouveau modèle qui est assez extraordinaire. Il me permet de figer le mouvement à des moments très précis. Prenons l’exemple des scènes de cascades avec un cheval au galop ou celle à l'escrime, j'ai la chance d'avoir un boîtier qui me permet d'avoir une latence intéressante ce qui me permet de choisir les bonnes photos.

Comment se déroule une journée type d'un d'un photographe de plateau ? Elle est calquée sur l'arrivée des acteurs ?

Exactement, on appelle ça le « PAT », le « prêt à tourner ». J’étudie la feuille de service avec tout ce qui va être fait dans la journée, et je note à quelle heure les acteurs commencent. En général, ils arrivent 01h30 avant les premières prises. Ils ont une phase de préparation, « la prépa » où ils vont être maquillés, coiffés et habillés. J’arrive donc au « PAT », car mon matériel est préparé la veille. J’ai relevé les séquences sur le scénario qui sont les plus importantes, donc je ne viens pas tous les jours sur le plateau. Avant les photographes plateau venaient tous les jours mais les restrictions de budget ont conduit à réduire leurs jours de présence sur le tournage.

Vous sentez-vous plutôt libre sur le plateau ?

Il y a certes, des contraintes, mais sur le plateau je pense être le seul qui est totalement libre. Je suis le seul qui ne reçoit pas d’infos du réalisateur. Je suis comme un électron libre et il m’arrive de passer une journée complète sans que personne ne m’adresse la parole.

Et à quoi servent vos photographies ?

Mes images, elles ont 2 utilités importantes. Il y a premièrement l'affiche du film. Et puis, toutes les photos, que l’on appelle photos d’exploitation du film, servant à la promotion du film. Donc toutes les photos que vous voyez d'un film, que ce soit une affiche ou celles prises sur le plateau, elles ont été faites par un photographe plateau qui est donc spécialisé. Ce n’est pas un photographe de presse qui vient sur un plateau et qui peut faire des photos qui seront utilisées plus tard.

Naïvement, je pensais que la plupart des photos que l’on retrouvait dans la presse pour promouvoir un film étaient directement extraite de la pellicule du film…

Vous avez raison car en fait, notre métier disparaît à cause de ça effectivement. C'est à dire que pour des raisons budgétaires, on extrait directement les photos de pellicule. Maintenant, ce qu'il faut comprendre c'est que l’on tourne en numérique et le rythme de cadence de la caméra, c'est à dire que le shutter de la caméra tourne au 1/50ème ou 1/100ème  maximum. C'est à dire que à cette vitesse-là, la caméra reproduit ce que voit l'œil humain. Et lorsqu’il y a du mouvement, la caméra reproduit ce flou de mouvement donc les copies d’écran de la pellicule ne peuvent se faire que si les choses sont assez statiques. Sinon, c’est flou. Un metteur en scène réfléchit avec une caméra à 24 images par seconde, c'est pas du tout le même travail que de réfléchir sur une image arrêtée. La différence est notable lorsque l’on étudie les photogrammes de la journée (les copies de l’écran de moins bonne qualité que les photos prises par le photographe plateau). 

Que pensez-vous de l’avenir du cinéma ?

Même si le milieu ne semble pas être si inquiet en ce moment, car l’activité reprend, je suis sceptique quant à l’avenir du secteur.  Quand je discute avec des jeunes de 20 ans, je suis surpris de constater qu’ils ne vont plus au cinéma. J’aime bien poser cette question, qu'est-ce que tu as été voir au cinéma et connaître les goûts de la jeune génération. Je pense objectivement qu’en utilisant les photos de plateau, on peut faire de belles choses culturellement parlant. Prenons l’exemple de mon cinéma de quartier, le complexe UGC Les Halles à Paris. Rien n’y a changé en 15 ans. On y retrouve les mêmes photographies exposées, le seul changement que je constate ce sont les paquets de M&M’s qui ont changé de place. Pourtant c’est un lieu de culture qui pourrait servir aussi d’espace d’expositions, y exposer des photos de cinéma, pouvoir acheter certains tirages,… Il y a un immobilisme aujourd’hui dans les salles de cinéma qui espèrent sans changer quoi que ce soit que l’affluence redevienne celle du passé. Sans aucune créativité…

La nouvelle génération est connectée au téléphone portable, c’est une réalité

Et je pense que eux changeront la donne parce que eux, ils vont savoir qu'est-ce qu'il va falloir comme photo pour Instagram ? Qu'est-ce qu'il va falloir comme vidéo pour Tiktok ?

Je pense que la nouvelle génération peut amener plein de choses hyper intéressantes au milieu du cinéma. Certains influenceurs peuvent aujourd'hui donner envie aux jeunes de regarder la série Zorro ou aller au cinéma. Que peut-on faire en terme de vidéo ou de photo pour aller chercher un public plus jeune, celui de Tik Tok ? Ce sont les questions que l’on doit se poser. Il y a un vrai truc à faire avec les influenceurs selon moi. J’ai fait un tournage en Belgique il y a quelques mois où ils ont fait venir 3 influenceurs sur le plateau pour pouvoir parler du film qui était en tournage. Cette approche est novatrice et intéressante selon moi.

Vous êtes actuellement dans la très belle Sierra de Alhamilla à El Chorrillo. Quelles sont vos impressions de ces paysages et de ces lieux mythiques où ont été filmés tant de westerns ?

On a effectivement l'impression d'être dans un western et je suis très fan du genre. On se dit que Clint Eastwood ou Bud Spencer va surgir d’un buisson. Je suis très content d'être dans cette région car c’est un lieu idéal pour travailler la photographie, avec les profondeurs de champs même si je vais avoir tendance à shooter les arrière-plans. On a aussi des lumières particulières ici. La semaine dernière, nous avons eu une journée un peu compliquée avec beaucoup de vent mais ça nous a amené quelque chose dans les images, avec le sable qui se lève, visuellement très intéressant. Les ciels sont très bleus, ils sont magnifiques, on se serait cru dans les Caraïbes.

Sans trop en dévoiler comment se déroule cette première partie du tournage ? Comment cela se passe-t-il avec Jean Dujardin ? C’est le rôle qu’il rêvait, il l’a souvent dit…

Tout d’abord, le casting est haut de gamme et très européen avec Grégory Gadebois dans la peau du Sergent Garcia, l’acteur italien Salvatore Ficarra dans le rôle de Bernardo. André Dussolier, jouera le père de Zorro, et Audrey Dana interprétera la dulcinée de Don Diego de la Vega. Et puis il y a évidemment Jean Dujardin avec ce double rôle de Don Diego de la Vega et le vengeur masqué. Deux réalisateurs aussi, Émilie Noblet et Jean-Baptiste Saurel, qui se répartissent les différents épisodes donc deux visions avec la même ligne directrice. Il règne une excellente ambiance sur le plateau avec un équipe technique mixte, française et espagnole. J'ai beaucoup travaillé avec Jean Dujardin, c'est vrai et à chaque fois, je suis en admiration car c’est quelqu'un qui est extrêmement travailleur, qui est toujours en recherche, il propose aussi plein de choses. Forcément, pour un photographe, c'est très riche de bosser avec lui. Il est ce que l’on appelle dans le jargon un bon client. Il est très réceptif aux photos et est très généreux. C’est donc toujours un plaisir de travailler avec lui et puis de le voir en costume de zorro. Le costume lui va très bien et il aime jouer en costume, cela se ressent. Qu’il soit Don Diego ou Zorro, cela fonctionne très bien. Il s’est préparé longtemps avant le tournage, il fait quasiment toutes ses cascades, il fait tout, toutes les scènes d’escrime aussi. Il monte à cheval très bien. C'est un peu comme un Belmondo. On sent l’envie d’interpréter ces deux personnages qui n’en font qu’un.

Travailler avec des personnes passionnées, il n’y a rien de plus inspirant et rien de plus gratifiant. Vous dites souvent qu'il faut capter l'émotion qui se dégage du jeu des acteurs, être discret, capter leur émotion. Récemment, vous avez capté celle qui émanait du plateau de tournage de « Je verrai toujours vos visages », film exceptionnel. Quel est votre plus beau souvenir, votre plus belle émotion, en ces 15 années dans le milieu du cinéma?

Ce que je trouve toujours intéressant c'est la variété, c'est à dire que c'est l'avantage de ce métier, c'est que chaque projet où l'on s'engage, est différent. Il n’y a vraiment pas de routine. Un souvenir me vient en tête, c’était pour France Télévision, on m'a appelé pour faire des photos sous l'eau de Jean-Marc Barr. « Le Grand Bleu » est le film qui m’a donné envie de faire du cinéma. C’est l’acteur qui me faisait le plus rêver lorsque j’étais plus jeune, en plus avec ma passion pour la plongée. C’était en ce début d’année, en Belgique et cela m’a permis de renouer avec mes amours, c'est à dire de refaire de la plongée et de photographier de nouveau sous l'eau et en plus avec mon idole de jeunesse. Je trouve cela vraiment incroyable.

Vous aviez l’impression de refaire « Le Grand Bleu », quelle belle émotion en effet. C’est bien que vous évoquiez cette passion de la plongée et de la mer. Vous êtes amateur de surf et il y a d'innombrables spots de surf en Andalousie, avec El Palmar notamment, vous avez encore le temps d'en pratiquer ?

Oui dès que je peux. J’ai quitté d’ailleurs Paris récemment pour cette raison, revenir dans ma région du sud-ouest pour aller surfer à Lacanau, à Hossegor ou dans le Pays Basque. Dès que je peux y aller, effectivement, j’y vais. Cela participe à mon équilibre, cela permet de couper avec le milieu du cinéma, milieu quand même très à part et de revenir à des choses essentielles pour moi, le contact avec la nature, la mer…

Quels sont les conseils que vous pouvez donner à nos lecteurs qui veulent faire de beaux clichés, de belles photos ici en Andalousie ?

L’endroit est hyper photogénique, c’est vrai.

Moi je pense que c'est quelque chose qu'on entend souvent. Oui, tu as un super appareil photo, donc tu fais des belles photos. Pour faire de belles photos, je pense qu’il faut avant tout une bonne lumière. Pour réaliser un beau portrait, il faut aussi un bel arrière-plan, bien choisir l’arrière-plan pour qu’il ne soit pas non plus trop surexposé par rapport à la personne photographiée. Ce sont de multiples petites choses où il faut être en éveil et où votre œil doit se former petit à petit. Que vous ayez un super appareil photo ou un iPhone, cherchez son cadre, observez les lignes, regarder ce qu'il y a derrière… Choisir la bonne lumière aussi, faut-il photographier à cette heure-ci de la journée, vers midi où les lumières sont très dures ou peut-être vaut-il mieux attendre le coucher du soleil ou se lever très tôt pour obtenir la meilleure lumière. Trouver enfin les choses qui vous inspirent et travailler, travailler sans cesse, ce sont à mes yeux les clés de photos réussies.

Une dernière question avant de vous remercier, Christophe. De l'appareil photo à la caméra, il n'y a qu'un pas que vous avez déjà franchi dans la réalisation de courts-métrages. Est ce une de vos envies, un jour, de réaliser votre propre long métrage ?

Forcément, oui. J'ai réalisé deux courts métrages. Le dernier est d'ailleurs passé au Festival du Film de Malaga. Je dirais que c'est quelque chose que j'ai envie depuis très longtemps, mais il y  a un « mais ». Mon problème, je pense aujourd'hui, est que je travaille avec des personnes très talentueuses.

Et la barre est haute…

Oui exactement. Le niveau est tellement élevé autour de moi là. Prenons Nicolas Bedos avec la série Alfonse, je trouve que c'est une telle réussite. Je me dis souvent dit que je ne parviendrai pas à avoir autant de talents. Donc pour l'instant, c’est vrai, j'ai un peu peur d'y aller, j'en ai envie mais je prends mon temps, je fais plein de tournages, j’observe, j’apprends et quand le moment sera là, je me lancerai. Là, je suis plutôt dans la retenue.

Merci beaucoup Christophe Brachet, bonne chance sur la fin de ce tournage et donnez-nous des nouvelles ! Et bonne chance pour tous vos beaux projets à venir…

Merci beaucoup et à bientôt !