Je vous invite à découvrir une surprenante randonnée. Tout commence le 21 Mars avec un appel téléphonique à la mairie d’Alfarnate. La raison de ce contact était des plus simples.
« -Bonjour ! Est-ce que les cerisiers sont en fleurs, madame?
Oui, la floraison a commencée me répond-elle, vous pouvez venir ! ».
Deux jours plus tard, après avoir parcouru une centaine de kilomètres, nous empruntons une petite route sinueuse qui grimpe vers le « pueblo » de Alfarnate.
A plus de 800 mètres d’altitude nous attend ce joli village coincé dans les hautes montagnes de lʼAxarquia (Province de Malaga).
Il est blotti dans une dépression de terres fertiles. Alfarnate constituait lʼun des passages obligatoires vers la province de Grenade au départ des côtes, voici des décennies.
Nos premières impressions sont liées à la propreté des lieux. Les 1550 habitants entretiennent leur petit joyau. Nous tombons aussi sous le charme de son architecture et de sa physionomie, héritées d’une lointaine domination musulmane, histoire oblige.
Alfarnate mérite, à plus d’un titre, une visite. Tout d’abord, on y découvre la plus ancienne « venta » d’Andalousie remontant à la fin du 17ème siècle (1691). Ah si les murs de ce repaire pour contrebandiers pouvaient parler. Celle-ci a accueilli de prestigieux visiteurs, quelques princes et autres têtes couronnées mais aussi les plus grands bandits et truands de l’époque glorieuse des Bandoleros (Tempranilo ou Louis Candelas pour ne citer qu’eux).
Au milieu de cette région surnommée « les Pyrénées de lʼAndalousie », Alfarnate, signifiant moulin à farine en langue arable, nous invite à parcourir ses rues et ruelles et à flâner sur ses places romantiques.
Le plus haut « pueblo » de la province de Malaga nous offre un paysage dʼune beauté singulière où les hauts sommets qui lʼentourent contrastent avec les nombreux champs d’oliviers et les majestueux cerisiers.
Dans cette si belle zone, ce qui attire avant tout notre regard, ce sont ces arbres en fleurs. L’objectif de notre visite est cette si belle promenade le long de sentiers bordés par tous ces arbres ayant revêtu leur manteau rosé. On y retrouve des milliers de cerisiers, ces arbres si délicats et si précieux, dont les racines jaillissent du sol, coincées dans les piles de pierres antiques. Le spectacle se décline en mille et une nuances de rose et de blanc qui contrastent avec le bleu du ciel et le brun des roches et des flancs de collines.
Grâce aux Sierras de Enmendia,Palamena et Jobo qui forment un ceinturon naturel enveloppant le village, les arbres fruitiers sont protégés et s’en donnent à cœur joie.
La genèse de ce spectacle éphémère qui vaut véritablement le détour est à rechercher dans les années 90. Certains agriculteurs prennent la décision de planter cet arbre fruitier profitant dʼune terre riche et abritée. Les délicieuses cerises récoltées dans le village ont depuis gagné en réputation. Et quand sonne l’arrivée du printemps, la période de floraison de ces arbres débute et le phénomène donne une « teinte japonaise » à ces vergers qui s’étendent sur plusieurs hectares.
Le vert des champs et des prairies, le bleu du ciel,et le blanc rosé des amandiers en fleurs, nous sommes plongés dans un tableau de Van Gogh…
Au Japon, il est de tradition de célébrer cette floraison au travers de la fête « sakura ». Cette coutume ancestrale asiatique s’est donc installée à Alfarnate permise par ces 30.000 arbres. Leur floraison attire des milliers de touristes en début de printemps. Une fête spéciale a également lieu dans le village le 5 avril.
Plus tard dans la saison, en juin, se célèbre un autre festival dans la ville consacrant la dégustation des fruits rouges. On y dévore plus de 3000 Kg de cerises.
Aujourdʼhui, plutôt que de parcourir un chemin de randonnée fréquenté par de nombreux touristes, nous optons, Dany et moi, pour un itinéraire bis et sortons des sentiers battus. Nous partons pour l’ascension du Pic del Villo, culminant à 1425 mètres d’altitude.
Les hauteurs impressionnantes nous offrent un spectacle unique et une plénitude régénérante. Le silence qui y règne et la tranquillité retrouvée forment un cadre idyllique aux paysages que nous offrent notre belle Andalousie.
Le sommet se mérite et l’ascension est compliquée pour les non initiés. Mais l’effort accompli, le panorama est splendide.
Il est difficile parfois de décrire ce que lʼon ressent à ces moment si privilégiés. En ces instants magiques, votre cœur bat la chamade.
Nous entamons notre descente vers 17h00 et le minuscule pueblo gagne en volume au fur et à mesure que nous nous en approchons.
Nous arpentons une dernière fois les ruelles du village blanc et au détour de cette dernière promenade, nous admirons les très belles céramiques croisées dont les illustrations font la part belle aux fruits rouges. Les anciens se sont réunis et assis à l’ombre, ils content leurs précieux souvenirs. Ils refont l’histoire, à la « sombra » des cerisiers en fleurs…