Notre équipe Esprit Sud magazine a eu la chance de recevoir comme invité, Pascal GRIZOT, le Président de la Fédération Française de Golf. Nous avons abordé avec lui l’état du haut-niveau français, le développement de la pratique, la transition écologique sur les greens, ses passions, ses challenges passés, présents et futurs…
Sans langue de bois, il a répondu à toutes nos questions, un an après son accès à la tête de la Fédération.
Alors que nous collaborons avec Legends Golf à l’organisation les 4 et 5 novembre d’un grand tournoi en compagnie de joueurs professionnels, opposant 50 Français et 50 Belges, le “combat des coqs”
Voici en exclusivité la première partie de notre entretien avec ce grand passionné de la petite balle!
Un quart de votre mandat s’est écoulé Monsieur Grizot, quel est le bilan que vous tirez de cette première année à la tête de la Fédération Française de Golf ?
Un bilan extrêmement positif. Tout d’abord car je prends du plaisir à faire ce que je fais tant pour la Fédération que pour le golf en général en France. Deuxièmement, les résultats sont plutôt bons dans une ambiance qui malgré tout reste très morose. Nous sommes l’une des rares fédérations à voir augmenter son nombre de licenciés. Ma philosophie est la suivante, il faut aussi pouvoir dire quand les choses sont positives et fonctionnent et non uniquement quand cela ne va pas. Il faut prendre la mesure de son plaisir, je suis extrêmement content de cette année écoulée. Ce ne fut pas simple pour nos collaborateurs avec ces 18 mois traversés de crise sanitaire mais globalement, nous tirons bien notre épingle du jeu.
Pour nos lecteurs Esprit Sud, pouvez-vous rappeler vos fonctions de Président de La F.F.G, quels sont les rôles qui vous incombent ?
Je suis à la tête d’une équipe de 32 membres et chapeaute les Délégations Régionales et les Comités Départementaux. Je suis élu par les clubs, par les Associations Sportives de chacun de ces clubs et je suis un Président bénévole, ce qui est une singularité au niveau mondial. La F.F.G. est la quatrième Fédération au niveau mondial en termes d’importance et tout le monde est payé. J’ai tenu à rester bénévole.
C’est assez surprenant et c’est tout à votre honneur, au regard de la charge de travail, notamment. Vous êtes très impliqué, un Président du changement aussi avec cette volonté de faire avancer les choses…
Bon, Président du changement, cela m’évoque un peu François Hollande. C’est vrai, je lui ressemble un peu physiquement. Bon, je préfèrerais que l’on me dise que je ressemble à Brad Pitt mais bon…
J’ajoute donc aussi un Président avec un grand sens de l’humour, Monsieur Grizot. Vous avez opté pour un virage à 180 degrés depuis un an maintenant avec la volonté de favoriser les étoiles naissantes « amateurs » et de ne plus axer les priorités sur les professionnels qui ont plus de deux ans sur les parcours… une philosophie bien différente.
Il faut dire que nous vivons dans un pays où l’assistanat est culturel. Pour atteindre le haut niveau ou pour la quête de la plus haute performance, l’assistanat ne doit pas exister. Bien au contraire, ce n’est pas dans le confort que l’on peut réussir à performer. Aider les jeunes est d’une grande logique car ceux-ci dépendent des moyens de leurs parents. Certains ont moins de chances que d’autres, le rôle de la F.F.G. est donc d’aider ces jeunes sans distinction, peu importe leurs origines sociales. Ce qui doit primer est leur niveau. Quand les jeunes décident de passer « professionnels », en ayant mis tout ce que l’on a mis en place ces dernières années, nous devrions parvenir à former les meilleurs amateurs du monde. Nous y sommes parvenus avec les filles, les résultats sont évidents. La filière féminine fonctionne très bien et quand on arrive à former les meilleurs amateurs du monde, la transition professionnelle est beaucoup plus facile et on n’a pas besoin de les aider « financièrement » car leurs excellents résultats leurs confèrent un rôle d’aimant sur les partenaires et sponsors. Les Françaises qui cartonnent actuellement donnent une bonne image d’elles-mêmes et n’ont aucun problème à trouver des partenaires. Elles sont saines, elles travaillent beaucoup et elles vont attirer des partenaires. La F.F.G. n’a donc pas de rôle à jouer ou plutôt plus de rôle à jouer car elle est intervenue en amont lorsqu’elles étaient amateures. C’est cette stratégie que la F.F.G. a décidé d’adopter, de mettre en place.
C’est vrai que le golf français se porte bien, surtout du côté féminin avec Céline Boutier, Céline Herbin, Pauline Roussin-Bouchard, Agathe Lainé, pour ne citer qu’elles. Elles brillent aussi sur le circuit américain du PGA Tour, aussi par leur image, ce qu’elle renvoie auprès des jeunes…C’est une grande fierté pour vous Monsieur Grizot.
C’est une immense fierté pour moi car la formule est simple mais elle est rarement applicable. Il faut la combinaison du talent, du travail et d’une image positive véhiculée. Le très haut niveau, c’est la culture du détail et réussir à combiner ces différents aspects. Un ensemble de facteurs et la personnalité de l’athlète aussi comptent. On peut avoir des joueurs très bons avec des personnalités plus communes ou qui rassemblent moins. L’image que les athlètes véhicules est devenue essentielle. Là, on a vraiment la chance d’avoir des personnalités qui sont à la fois intéressantes et capables de susciter des vocations. Les petites filles peuvent se dire qu’elles peuvent aussi y arriver quand elles voient la « success story » de Céline Boutier ou de Pauline Roussin-Bouchard. On doit admirer tout d’abord le résultat mais aussi tout ce qui a été mis en place pour y arriver. Et pour moi, la filière féminine et les filles précitées cochent toutes ces cases-là et me rendent très, très fier.
Et du côté des hommes, peut-on espérer dans les prochains mois, ce même rebond ?
C’est vrai, il suffit de regarder les résultats. On n’a pas de Français dans le top 50 mondial. On a eu récemment Victor Perez qui a notamment atteint la 41ème place du classement mondial en 2020. L’année précédente, il avait remporté sa première victoire sur le circuit européen lors du championnat Alfred Dunhill Links. Il y a aussi Antoine Rozner qui a remporté deux tournois sur le Challenge Tour. On a beaucoup de bons joueurs mais malheureusement, les bons résultats ne sont pas au rendez-vous. C’est plutôt à eux de poser la question du « pourquoi ». Aujourd’hui, je pense que nous avons un vivier de jeunes qui sont en pleine ascension, entre 14 et 17 ans. Ils peuvent être demain, les très bons joueurs professionnels, à l’image de Céline ou de Pauline. Cela étant, ce que nous essayons de leur inculquer, c’est la quantité de travail qu’il faut pour arriver à un tel niveau de résultat. La qualité bien entendu mais cela ne suffit pas. La F.F.G. fixe des objectifs et pour les atteindre, il faut fournir une charge de travail énorme. On n’atteint pas le top 20 des meilleurs joueurs au monde avec uniquement du talent. Y a un travail énorme derrière un tel niveau. Le seul talent ne suffit pas, il faut énormément de travail. Céline Boutier était numéro un mondial en amateur, elle est actuellement 29ème, classement professionnel. Entre le moment où elle est passée professionnelle et maintenant, tout ce qu’elle a mis en place et tout le travail fourni conduisent à un tel résultat. Elle progresse car elle continue à travail avec le même acharnement. Avant tout c’est beaucoup de travail, beaucoup d’abnégation aussi.
Vous êtes un des acteurs principaux de l’image véhiculée du golf français à l’échelle internationale, vous œuvrez vraiment par rapport à cette belle photographie du golf blanc bleu rouge. Dans cet ordre d’idée, on peut aussi parler d’un avant et après « Ryder Cup 2018 », projet que vous avez porté et que vous avez mené à bien. J’imagine qu’il figure parmi vos plus beaux souvenirs…
Clairement. Quand vous êtes un golfeur passionné, c’est juste inouï. Je joue au golf depuis que j’ai 9 ans. J’ai encore la chance d’avoir autour de moi pas mal d’amis avec qui j’ai partagé ces premières expériences, d’ailleurs, Guillaume Livet, le trésorier de la F.F.G. est un ami très proche qui était avec moi au Golf du Prieuré quand on avait à peine 10 ans. Vous imaginez, nous faisions du putting sur le putting green, on s’amusait et si on nous avait dit que 40 ans plus tard, on organiserait la Ryder Cup, on aurait dit que ce n’est pas possible. Cela a été une expérience extraordinaire pour moi. Je suis fier du résultat que nous avons obtenu, tous ensemble car c’est le travail de toute une équipe. C’est une opportunité unique pour le rayonnement de mon pays, pour l’image de la France et pour la légitimité qu’elle a acquis dans le monde du golf. Être capable d’organiser la plus grande compétition mondiale, celle qui génère le plus de visibilité, d’ambiance et de folie. Avoir eu la chance d’organiser cette compétition dans mon pays, la France, fut un immense honneur. Cela a positionné la France sur la carte du golf mondial.
436.846 affiliés en France, cette année 2021, c’est un record absolu. On bat tous les records en nombre de licenciés…
Le record, était précédemment de 422.000 affiliés en 2012 et nous battons celui-ci cette année. Bien entendu, il convient de rester humble. Alors que pour certains sports, ceux en salle et en équipe, cette période a été une véritable catastrophe. A l’inverse, les sports individuels de plein air ont eu le vent en poupe. Il faut mettre les choses dans leur cadre. Maintenant, une telle croissance doit être accompagnée et donc je dois saluer le travail qui a été accompli par tous les acteurs du secteur en France pour atteindre ces chiffres.
Il y a une féminisation du golf et de plus en plus de femmes se retrouvent sur les greens. Peut-on dire que la femme est l’avenir du golf, selon vous ?
Écoutez, la femme est l’avenir de l’homme, ça c’est sûr et au niveau du golf, plus il y aura des femmes qui joueront et plus il y aura d’hommes aussi qui joueront. Aujourd’hui, la vie a changé et la place des femmes dans les clubs de golf aussi, endroits où l’on ne retrouvait jadis que des hommes. Les couples passent plus de moments ensembles sur les greens. Les femmes jouent, le mari peut aussi y venir et les enfants aussi… C’est un sport excellent tant pour la santé physique que mentale, il faut le rappeler. C’est le seul sport que l’on peut pratiquer de manière transgénérationnelle, on peut jouer avec son arrière-grand-père… mon père a 90 ans et il joue avec ses petits-enfants qui ont 10 ans. C’est un des seuls sports où l’on peut continuer à jouer en famille. Un sport avec plein de vertus, c’est aussi pour cela qu’il a le vent en poupe.