Exposition Little Pablo, l’art qui fait du bien !

Rédigé le 09/02/2024
Frederic André

L’équipe du C.A.C. Malaga (Centre d’Art Contemporain) ne s’y est pas trompée. Elle vient de consacrer une grande et belle exposition à l’artiste cordouan « Little Pablo » et à ses œuvres colorées aux allures naïves.



Aussi connu sous le pseudo « Little », Pablo Rodriguez est un artiste talentueux, accessible, au cœur immense et au talent infini que nous avons eu la chance de rencontrer et qui nous a laissé une bien belle impression. Avec lui, les petites choses du quotidien deviennent des explosions colorées réconfortantes et entrer dans l’univers joyeux de « Little Pablo », c’est se replonger dans l’enfance. Ses œuvres simples sont puissantes et triomphent de naïveté et spontanéité. Il propose une vision technicolor qui lui est propre. A la différence de nombreux artistes de sa génération, l’artiste veut avant tout rassurer et réconforter.


Il n’a pas l’ambition de provoquer ni de bousculer avec ses productions artistiques. Ses dessins et ses illustrations aux messages simples sont complétés par des céramiques colorées, le tout permettant à l’artiste de créer un monde d’amour et de fragilité. Le spectateur découvre un univers antidépresseur trahissant le plaidoyer d’un optimiste.



Bonjour Pablo Rodriguez et tout d’abord merci de nous accorder un peu de votre temps. Comment allez-vous ? Comment se sont déroulés les derniers jours à Malaga avec l’inauguration de votre exposition au C.A.C.1?

Je viens de rentrer à Séville, où je vis et je suis sur un petit nuage. Épuisé mais vraiment très heureux. Cela a été beaucoup de travail et cela se concrétise par cette inauguration où j’ai retrouvé énormément d’amis, la famille, des personnes que j’aime beaucoup, c’est un moment intense. Revenir à Malaga où j’ai vécu quatre ans par le passé pour préparer cette exposition a été une expérience unique.

A quoi doivent s’attendre les visiteurs, Pablo Rodriguez ?

J’espère que les visiteurs y trouveront un univers réconfortant, qu'ils retomberont un peu en enfance et verront le côté ludique du monde que j’ai créé pour eux avec mes dessins et mes céramiques. Un univers de jeu qu’ils pourront expérimenter au travers des couleurs, des formes, juste profiter de cet environnement joyeux, voilà ce que j’espère créer avec cette exposition.

Vous avez ressenti un jour, le besoin de partager vos dessins et illustrations avec les autres. Quel fut le déclic de cette démarche qui vous a conduit à vivre de votre art ?

Tout démarre de l’accident de mon chien. Il devait subir une opération et je n’avais pas l’argent pour payer celleci. L'idée de me rendre dans la rue avec mes dessins et de les vendre m’est venue. Il y a eu pas mal de rencontres, le bouche à oreille a aussi pas mal fonctionné et les ventes ont débuté. Après l’opération financée par mes dessins, j’ai pris un chemin plus professionnel et j’ai été contacté par des journaux et magazines pour réaliser des illustrations. Et les choses se sont enchaînées.

Plus récemment, la céramique est devenue pour vous un autre moyen pour véhiculer vos messages. Pourquoi cette matière, apporte-t-elle un plus par rapport aux dessins et aux illustrations ?

Cela débute par une collaboration avec une marque de vêtements. Je fus immergé dans ce processus créatif et j’ai réalisé que le papier et les dessins ne permettaient pas ces notions de « 3D » et de volume. J’ai participé alors à des ateliers de céramique et de fil en aiguille, c’est devenu une évidence. J'ai aujourd’hui mon propre atelier, à Séville. C’est vrai que je suis fasciné par l’étendue des choses que l’on peut faire avec la céramique. J'apprends chaque jour un peu plus et développe de nouvelles techniques. Cela a été une révélation et un rêve de me plonger dans l'univers de la céramique. 



Où puisez-vous l’inspiration Pablo Rodriguez ?

Je citerais tout d’abord la musique flamenco, elle fait partie de mon quotidien. Je suis aussi inspiré par des artistes plasticiens comme Patricio Cabrera ou Maria Jerez, ils sont tellement talentueux. Et puis il y a la vie réelle, les gens que je croise dans la rue, les moments que je passe avec mes amis et où l’on discute, il en ressort chaque fois des dessins. Les autres artistes qui m’entourent et l’évolution de leurs créations sont aussi une source d’inspiration pour moi.

Vous citez le flamenco en premier dans cette longue liste inspirante. L’Andalousie est omniprésente dans vos œuvres…

Le flamenco est omniprésent dans la ville où je vis et je suis constamment inspiré par cet art. Cette présence créée vraiment une spirale d’inspiration constante. Et ce n’est pas que Séville, cela s’étend à toute l’Andalousie.

J’ai relevé par exemple sur votre compte Instagram, cette photographie de vous à Ubrique, célébrant la journée du cuir…​ Peut-on imaginer que vous puissiez faire entrer le cuir dans votre art ?

Oui en effet, l’Andalousie est une source d’inspiration inépuisable. J'aimerais également apprendre à travailler la peau, le cuir. Cette matière est aussi fascinante.

Votre univers coloré est réconfortant. A l’inverse de beaucoup d’artistes éprouvant la nécessité de provoquer, vous faites le choix du consensuel et vous créez des œuvres simples aux messages positifs, plongeant le spectateur dans un univers coloré et réconfortant… Le public aimant les messages simples qui y sont véhiculés s’y blottit. Il en va de même pour vous qui y trouver sérénité et sécurité…

J’ai étudié la communication et j’ai toujours dessiné. J'ai toujours du papier et un crayon sur moi. J'ai appris que les phrases simples, communiquant de manière claire un message sont souvent les plus percutantes. Et puis il y a le côté positif et les messages optimistes, cela fait partie de moi également.

Il y a comme un sentiment de « je n’ose pas transgresser », « je ne me permets pas d’aller au-delà d’œuvres naïves » pourtant vous avez aujourd’hui une certaine reconnaissance dans le milieu de l’art. « Little » deviendra-t-il un jour « Big » ?

J’aime cette vision que vous semblez avoir d’un public amateur d’art blasé et lassé par les messages complexes. Il y a un peu de cela aussi dans les œuvres de Javier Calleja… C’est possible, il est vrai que mon travail évolue et chaque année je réalise les changements qui s’opèrent. Les dessins me permettent de traduire ce que je perçois de ce monde, de la complexité de celui-ci. C’est presque thérapeutique, des situations très complexes que je vis et puis en émergent des messages simples et évidents. Il y a cette démarche de simplification. Mes dessins m’aident à comprendre le quotidien et à saisir la complexité du monde dans lequel je vis. 


J'aime beaucoup cette image de l’artiste « docteur du cœur" qui fait du bien avec vos sparadraps et pansements colorés qui rendent le sourire et apaisent. D’où vient l’idée de ces créations ?

C’est l’illustration d’une expérience vécue et la manière de la dépasser. Une rupture affective qui m’a brisé le cœur. Je me rappelle de cette époque où spontanément, la tristesse me conduisait à dessiner des sparadraps de ce type avec un coeur, des illustrations accompagnées de messages simples comme «tout va bien se passer», « cela va se régler ». Et avec l’étape de la céramique, cela s’est transformé comme un élément « iconique » de mes créations.

Quelle est votre vision de l’époque dans laquelle nous vivons aujourd’hui ?

La crise sanitaire a été très inspirante pour vous, cet isolement… Le message positif général de mon œuvre est en contraste avec ce que nous traversons et les crises que nous vivons actuellement. Il y a comme une volonté de garder le sourire, de diffuser des messages positifs pour créer comme une barrière délimitant un espace où je peux jouer, comme un enfant et quitter cette réalité parfois pesante.

Vous êtes originaire d’un petit village de la Sierra de Cordoue?

J’ai grandi dans le petit village de Doña Mencía, j’ai de magnifiques souvenirs de ce lieu enclavé dans les montagnes. J’étais en contact avec des producteurs d'olives et avec la nature. Jeune adulte, j’ai pris la décision de partir vivre à Malaga. J’étudiais à l’université et je faisais des petits boulots. J’ai par exemple aidé au montage de l’exposition de l’artiste Diego Santos dans le même musée qui m’accueille aujourd’hui. Quinze ans plus tard, le C.A.C. me met à l’honneur, c’est dingue.

Et quels sont les endroits magiques en Andalousie où vous aimez vous déconnecter et trouver l'inspiration?

J’ai la chance d’avoir une petite maison à la plage à Mazagón (Parc de Doñana) et j’aime m’y rendre et déconnecter. J’y retrouve la nature, les enfants qui jouent sur la plage, les pêcheurs, les paysages verdoyants sans construction. Les moments là-bas me permettent aussi de réfléchir et de penser aux orientations que j’ai envie de faire prendre à mes moyens d’expression.

Quels sont vos futurs projets ? Le dessin, les illustrations et les céramiques seront-ils rejoints par d’autres matières pour exprimer votre art ? Vous avez déjà évoqué dans cette interview le cuir…

J’ai plusieurs expositions en 2024 dans différentes villes. J’aimerais travailler le bois aussi, utiliser des enregistrements vidéos… Les notions de volume et de matériaux, sont des concepts infinis, sans limite. Je termine également mon second ouvrage (le premier est disponible à la librairie du C.A.C. et porte le nom de « Eres mi persona favorita »). J’aimerais aussi franchir les frontières et exposer dans d’autres villes, pourquoi pas une exposition à Paris. Et puis profiter de la vie…

Merci et tous les succès pour cette belle exposition et pour vos futurs projets. Y a-t-il un message que vous voulez faire passer auprès de nos lecteurs ?

Sachez qu’un des vases exposés dans le musée comporte un message écrit en français, titre d’une célèbre chanson française. Je vous défie de le retrouver. J’écoute de nombreux artistes français, comme mon papa qui en écoute beaucoup, Louise Attaque, Serge Gainsbourg, Jain ou encore Stromae. J’aime beaucoup la culture française. Et si il y a des galeristes en France qui sont intéressés par mes créations, qu’ils se manifestent ! 


Filez absolument découvrir l’exposition de « Keep It Cute » qui lui est consacrée au C.A.C. de Malaga - La Coracha jusqu’au 07 avril 2024 (du mardi au dimanche, l’entrée est gratuite).

Retrouvez l’artiste sur Insta :  Little (@little_exhibition)

Son studio est situé à Séville, Avenida de la Ingenieria, 9 local 25 (sur rendez-vous via le 0034 678 709 209).