Chaque année, le 28 décembre occupe une place particulière dans le calendrier hispanique et pour une raison précise, cher lecteur. Cette date, connue sous le nom de « Día de los Santos Inocentes », mêle en effet mémoire religieuse, héritage populaire et esprit joueur. Historiquement parlant, cette journée est celle où l’on se rappelle un épisode tragique du christianisme tout en profitant d’un climat festif où l’humour devient le protagoniste.
La célébration trouve son origine dans le récit du massacre des enfants de Bethléem, ordonnée par le roi Hérode. La naissance de Jésus à Bethléem provoque la réaction du souverain (celui-ci soutenu par Rome devint de plus en plus paranoïaque et meurtrier au cours de son règne), qui ordonne le massacre des enfants innocents. Ces enfants sacrifiés sont considérés par l’Église comme les premiers martyrs de la foi chrétienne. Longtemps, cette date fut vécue avec gravité et recueillement mais au fil du temps, la tradition religieuse s’est entrelacée avec des coutumes populaires héritées du Moyen Âge. Le sérieux s’est alors transformé en rire, la douleur en jeu, la mémoire et le recueillement en fête.
Aujourd’hui, le 28 décembre est un jour où l’on joue à tromper, où l’on raconte des histoires inventées, où les médias eux-mêmes s’autorisent de fausses nouvelles pour piéger lecteurs et téléspectateurs. Il s’agit en quelque sorte de notre premier avril pour nous Belges, Français ou Luxembourgeois. Lorsqu’une personne tombe dans le piège, on lui lance un sourire complice accompagné d’un « Inocente, inocente ». Ce rituel bon enfant a donc traversé les générations, gardant vivant cet esprit malicieux profondément ancré dans la culture espagnole et latino-américaine.
Finalement, ce « Día de los Santos Inocentes » n’est donc pas uniquement une journée de blagues, il s’est mué en un bel exemple de la manière dont les sociétés transforment la douleur en souvenir collectif, puis en célébration légère. Cette illustration nous rappelle que l’humour rapproche, qu’il permet de passer au-delà d’histoires difficiles. En entrant dans la culture populaire, ces traditions prennent dans le sud, une place à côté de la musique, de la gastronomie ou des fêtes de village.
Le 28 décembre, cher lecteur, il vaut mieux garder l’œil ouvert et opter pour l’esprit joueur. A trois jours du passage à l’an neuf, cette tradition est une douce manière de conclure l’année dans la complicité, la mémoire et le sourire. Alors, belle fête des Saints Innocents à toutes et tous !